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A Monthou sur Cher….

...Terre-Neuve : la Seigneurie oubliée.

Avec cette recherche, je poursuis l’étude des lieux autour desquels se sont construites les structurations féodales de ma commune et des territoires limitrophes, puis l’évolution de ces « terres » suivant la terminologie d’ancien régime en seigneuries, puis en domaines à partir de la Révolution jusqu’à la période actuelle.

A l’origine, un lieu de « surveillance » :

Je vous renvoie à mes textes précédents sur le Gué-Péan, Bizard, Champhlé, le Vaulx St. Georges, La Croix.

Terre-Neuve a suivi le même processus d’évolution.

Terre-Neuve est située aux limites du « plateau ou de la plaine » et du « coteau ». Une rude pente  conduit à la  « vallée » des « ruisseaux » du Bavet et des Anguilleuses, à l’intersection des routes qui vont aujourd’hui de Monthou à Choussy à droite et à Thenay à gauche.

Elle était donc un poste de surveillance fort bien placé sur la voie antique qui de Blois par Sambin, Thenay, Terre-Neuve, plongeait sur le gué du Gué-Péan pour rejoindre par Bizard, soit Thésée vers la Mansio des Mazelles et les gués pour franchir le Cher, soit Monthou par la Croix.

De même et dans la même fonction, Terre-Neuve se trouve sur les confins de la zone frontière délimitant les anciennes tribus celtes des Turons et des Carnutes. On sait que ces zones étaient des sortes  de no mans’lands neutres où s’effectuaient échanges, informations, etc. Le nombre des marques qui identifiaient l’emplacement de ces zones est ici particulièrement important avec des  pierres, arbres, buissons appelés « délimitants »,  et des toponymes caractéristiques.

Ce sont ces postes immémoriaux de surveillance, dont certains auront aussi une vocation de défense, qui seront l’ossature ultérieure des fiefs et seigneuries féodales.

Une photo aérienne communiquée par Mr. Jean Epron fait apparaître des fossés longeant l’actuelle route qui devaient donc protéger ce lieu de défense.

Mme. Vve Lucas précise, qu’il y quelques dizaines d’années, ces fossés existaient encore pour partie et que de l’eau y coulait de manière suffisante pour que les femmes puissent y faire les lessives.

Enfin, on peut encore observer. à ce qui s’appellera le Grand Terre-Neuve, des vestiges de très anciens pans de mur avec des meurtrières, un escalier et une cave voûtée eux aussi très anciens, un puits à la profondeur impressionnante.

Un nom lié aux grands défrichements du Moyen-Age :

Le début des défrichements est très ancien. On le date dans notre zone à partir des hommes du néolithique qui vont déboiser en remontant des vallées vers coteau et plateau.

A partir de la période de christianisation vers le VIe siècle, avec une présence notable de moines et d’ermites évangélisateurs, les défrichements vont s’accélérer.

Il s’agit de mettre le sol en cultures en réduisant sensiblement les zones boisées et friches, abondantes dans ces confins de la Sologne, et pouvoir ainsi faire travailler et nourrir une population plus nombreuse.

Ces défrichements vont se multiplier pour atteindre leur plénitude du Xe au XIIe siècle.

Ainsi l’appellation Terre-Neuve ne laisse aucun doute sur son lien avec les défrichements du plateau ou de la plaine. Les lieux proches de Terre-Neuve portent tous des noms en relation avec les défrichements : la Chambaudiere, à la limite Monthou/Thenay ; la Champlonniere et Champerreux, à la limite Monthou/Choussy ; la Rodiere, contenue autrefois dans Terre-Neuve, ancienne racine francique ; etc. Tous ces noms renvoient au mot champ ou étendue de terre cultivable.

Ces défrichements furent de plus en plus impulsés par les seigneurs fonciers laïques et religieux, comme source de revenus accrus au travers des impositions pesant sur les paysans qu’ils installaient sur ces nouvelles tenures.

Les seigneurs de Terre-Neuve :

La famille de Faverolles :

Le premier aveu pour le « lieu et fief »de Terre-Neuve que nous connaissons date du samedi d’avant la St.Sépulcre 1289 ; c’est celui de Guillaume de Faverolles à Jean de Chalon, seigneur de St.Aignan.

Ces Faverolles, famille du Berry, familiers des seigneurs de St.Aignan, possèdent plusieurs autres  terres sur Monthou, Choussy, St.Romain, Thésée. Des chartes attestent de donations notamment à l’Abbaye de Pontlevoy : en 1228, un Hubert de Faverolles leur donne « une hémine de froment et que lui paye annuellement le prieur de Choussy » ; en 1250, un Guillaume de Faverolles leur confirme une donation antérieure de ses parents sur Monthou  ; en 1263, dans la donation de Odon de Grosbois d’une justice qu’il détient toujours à l’abbaye de Pontlevoy, nous apprenons que Guillaume de Faverolles possède des terres  tout près de Terre-Neuve, sur Choussy.

En 1287, un Hubert de Faverolles cède à bail le moulin de la Varenne (proche de Terre-Neuve) au prieuré de Cornilly.

En 1313, un Odet de Faverolles est aussi possessionné sur Monthou, dans cette zone.

En 1314, un Macé de Faverolles prête au seigneur de St. Aignan plusieurs hommages pour ses terres et en particulier pour « son hébergement de Terre-Neuve et celles qui l’avoisinent de l’Arraudiere et de la Fosse Rémeuse ».

En 1342, un autre Guillaume de Faverolles fait aveu ainsi que Foi et Hommage pour Terre-Neuve.

La famille de Faverois, vraisemblablement la même que les Faverolles.

En effet, un Gaucher de Faverois qui appartient à une famille de la grande bourgeoisie blésoise, achète le domaine de Fougères en 1334. Cette famille vient d’être anoblie, nous dit-on. Les de Faverolles précédents semblent appartenir à la noblesse d’origine. Autre branche ? Erreur ? En 1346, un Gaucher de Faverolles fait Foi et Hommage pour la Justice de Fougeres et la métairie d’Amont au seigneur de St.Aignan. Il y donc de fortes chances que ce soit le même personnage d’autant que les documents attesteront de l’appartenance de Terre-Neuve à la terre du Roujou qui fut durant un temps incluse dans la seigneurie de Fougères.

Ainsi se succèderont comme seigneurs de Fougeres, Martin de Faverois (1351, Foi et Hommage au seigneur de Montrichard ), Reynaud de Faverois (1391, Foi et Hommage au seigneur d’Amboise ). 

En 1383, c’est un Berthelot Fabre qui présente Foi et Hommage pour le fief et seigneurie de Terre-Neuve au titre de sa femme Jeanne, fille de Jean de Chaumont. Je n’ai pas trouvé le lien expliquant cette présence.

La famille de Refuge-Villebresme :

Jean de Refuge, appartenant à une famille originaire de Bretagne, épouse Jeanne de Faverois qui hérite en 1438 de la seigneurie de Fougères. Elle est la fille de Renaud de Faverois, maître des Eaux et Forêts de Blois. Lui est Général des Aides, puis des Finances, du duc d’Orléans, frère de Charles VI.

Leur fils, Pierre de Refuge sera autorisé par Louis XI à reconstruire le château de Fougères dévasté par la guerre de Cent Ans. Il est lui aussi Général des Finances, gouverneur d’Asti au Piemont, etc.

Parmi ses enfants, deux sont liés à notre étude.

- Marie qui épouse en secondes noces, Jean Potin ( d’autres sources donnent une Anne ). 

Ainsi en 1532, nous trouvons leur fils Méry Potin, seigneur de Mauléon, homme d’armes de la compagnie de Mgr de Nevers, prêtant Foi et Hommage pour Terre-Neuve.

- Jeanne qui épouse Jean de Villebresme, seigneur de Fougeres et de Boissay.

Les Villebresme sont une famille de grands notables blésois. Ils possèdent l’hôtel de Villebresme à Blois, appelé la Maison de Denis Papin, rue Pierre de Blois.

Ce Jean est conseiller du duc d’Alencon et gouverneur de Rodez.

C’est lui qui achète la seigneurie de Roujou en 1528 à Jacques de Pas de Feuquieres.

Le Roujou dont dépend Terre-Neuve appartenait au XIe siècle à la famille Frangal, comme Fougeres. Puis la terre de Roujou fut éclatée en plusieurs fiefs. Ils furent à nouveau rassemblés vers 1450 par Guillaume de Paris.

Jean de Villebresme va agrandir le château du Roujou.

Et nous trouvons en 1573, un Pierre de Villebresme, seigneur du Roujou et de Terre-Neuve, qui prête Foi et Hommage au seigneur de St.Aignan pour le fief du Petit Combloux, situé à Terre-Neuve

Nous aurons, au titre des  Villebresme, un dernier Foi et Hommage pour Terre-Neuve et le Petit Combloux, qui vient de lui être réuni car les «  bâtiments sont tombés en ruines », en 1594. Il sera prononcé par Simon Riolle, Lieutenant Général du Baillage et Praésidial de Blois, au titre de sa femme Louise de Villebresme et comme procureur de Jacques de Villebresme.

Ce qu’il subsistait de la seigneurie de Fougeres sera vendue au marquis d’Effiat en 1686.



La famille de Maillé-Brézé :

La famille de Maillé tire son nom du lieu de Maillé, aujourd’hui Luynes en Indre et Loire. Une alliance leur fera accoler le nom de Brézé. C’est une des plus importantes familles nobles de Touraine dont plusieurs membres occuperont des fonctions importantes. 

Il y a plusieurs branches.

Celle qui concerne notre étude est d’abord celle des Maillé-Bénehart, du nom d’une de leurs possessions dans la Sarthe. Ils sont qualifiés de seigneurs de Benehart.

Elle est issu de Jacques II de Maillé qui épouse la fille de Jean de Villebresme. 

Son fils Jacques III sera gouverneur de Vendôme ; c’est un soutien de la Ligue et un adversaire du futur Henri IV qui le fera pendre à la capitulation de Vendôme en 1589 et ses biens confisqués.

Son petit-fils René s’installe au Roujou en 1618.

Il est gentilhomme ordinaire de la chambre du Roi, capitaine et maître des chasses du comté du Maine. Il est nommé « seigneur du Roujou » où il s’était installé en 1618 et agrandira le château.

Mais c’est déjà en 1616 que René de Maillé avait prêté Foi et Hommage pour la seigneurie de Terre-Neuve.

Nous le retrouvons dans le même exercice en 1643 : cette fois-ci c’est le procureur fiscal du Roujou qui supplée René de Maillé dans l’acte notarié de Foi et Hommage pour Terre-Neuve

Et c’est son fils René de Maillé qui le fera en 1646, puis en 1648 son autre fils Henri de Maillé.

En 1664, c’est René de Maillé, fils aîné de Henri de Maillé qui prête encore Foi et Hommage pour Terre-Neuve.

Mais c’est Francois-Henri de Maillé, second fils de cet Henri, qui est considéré comme l’auteur de la branche des Maillé-Roujou, car lors de la succession de ses parents en 1669, il obtiendra la pleine propriété de la terre du Roujou.

Il va donc à son tour prêter Foi et Hommage en 1692 ( je n’ai rien trouvé avant ) et en 1709. Il décède  en 1715. Il était l’époux de Francoise-Marguerite Bouteiller.

C’est son fils Louis de Maillé, né en 1699, qui avait été page de la Petite Écurie du Roi, qui prend la suite des Foi et Hommage, comme en 1747. Il eut deux épouses : Catherine le Fuzelier et Francoise Bonne de Rochefort.

Ce sont leurs enfants qui sont les vendeurs de la terre du Roujou, donc avec Terre-Neuve.

Comme on peut le constater, les actes d’aveu, de Foi et Hommage, même s’ils sont aujourd’hui disparus ou enfouis dans des archives privées peu accessibles, sont précieux : ils sont autant de jalons pour appréhender les évolutions foncières seigneuriales et les successions sous l’Ancien Régime.

La famille Richou-Leconte :

Le 12 novembre 1777, la terre du Roujou est achetée, chacun pour moitié, par Louis Richou de Richefort et son gendre Joseph Louis Leconte.

Les vendeurs sont :

Louis de Maillé Brézé, marquis de Maillé, seigneur de Roujou, Fresnes, Terre-Neuve et autres lieux, ancien capitaine au régiment du Bourbonnais, chevalier de St.Louis qui demeure au château de Roujou.

François Alexis de Maillé, chevalier comte de Maillé, ancien commandant de bataillon au régiment de Béarn, chevalier de St.Louis qui habite à Beaugency. Il a une procuration pour vendre de son frère qui  suit.

Joseph Anne de Maillé Brézé, ancien capitaine des vaisseaux du Roi, chevalier de St.Louis qui demeure habituellement au Château Royal de Blois.

Et leurs sœurs ou leurs ayant-droits.

Un neveu, fils de Catherine Bonne de Maillé, décédée, épouse de Claude Silvain de Boisliniere.

Marie Francoise de Maillé qui demeure aussi à Beaugency et a donné procuration à François Mahé, seigneur du Brésil.

Louise Catherine de Maillé, épouse de Charles Noel Pellegrain de l’Estang.

Enfin, Marie Anne de Maillé qui est demoiselle de St.Cyr.

L’acte, comme il se doit, énumère les lieux concernés par cette vente, relevant de la seigneurie de Roujou.

Pour ce qui concerne notre recherche, sont inclus :

«  Plus le lieu de Terre-Neuve situé paroisse de Monthou sur Cher composé d’un grand bâtiment granges bergerie toits ayant cours jardins pâtureaux taillis futaies terres labourables et non labourables prés et tout ce qui dépend de ce lieu de Terre-Neuve.

Plus la métairie du Petit Combloux avec toutes ses dépendances et près du dit lieu.

Plus la métairie de la Raudiere aussi située près du dit lieu de Terre-Neuve »

Il s’y rajoute le censif de Terre-Neuve avec : les droits de chasse, les cens, rentes et droits « qui y sont dûs suivant les titres et aveux du dit fief et la somme au vu de la coutume de prévoir les dits droits pourrait monter à environ 5 livres par an ».

Enfin, la somme de mille vingt cinq livres se rajoutera au prix de la vente et correspond au cheptel exploité par les deux fermiers Boistard et Joudon.

L’ensemble de la seigneurie du Roujou est vendu 83 062 livres et 6 sols et de longues dispositions fixent les modalités du paiement et la répartition entre les vendeurs.

Le château est « très délabré ».

Voyons maintenant les acheteurs :

Louis Richou est qualifié dans plusieurs actes notariés passés à Paris dans les années 1750-1770 de « bourgeois de Paris ». C’est de toute évidence un affairiste qui constitue des rentes à nobles et bourgeois. C’est le gestionnaire des biens de la famille de Coigny. Il sera d’ailleurs le tuteur des enfants mineurs de Jean-Antoine dit le marquis de Coigny, lieutenant général des Armées du Roi, tué en duel en 1748. Dans les familles de la noblesse, la garde noble assurée par la famille était dissociée de la tutelle matérielle des biens souvent confiée à un homme de confiance plus spécialisé. Louis Richou rend compte de sa tutelle en 1761.

Ce lien avec les Coigny apparaît dans l’acte d’achat comme dans les autres rares documents où son nom apparaît ( je n’ai rien trouvé concernant ses origines familiales et géographiques ni à quelle terre ou propriété correspond le nom de Richefort qu’il a accolé à son patronyme ). En effet, il est qualifié de « secrétaire de la Petite Écurie du Roi ». Or, il n’existait pas de charge de secrétaire de la Petite Écurie. Par contre celui dont il fut le tuteur Marie François Henri, duc de Coigny détenait la charge de Grand Écuyer de France. Louis Richou, son intendant, gérait vraisemblablement cette charge pour le compte de son maître. Ce qui s’est traduit par un de ces titres valorisants dont étaient si friands les bourgeois en recherche de reconnaissance sociale et d’anoblissement !

Joseh-Louis Leconte est lui un blésois, né à Blois le 14 Juillet 1742. Il appartient de par ses parents et grands parents, au milieu des avocats et des notaire à Blois, à Chaumont, Vallières, Mont près les Chambord, etc.

Son père Joseph Leconte est lui aussi qualifié de « bourgeois de Blois ». Joseph Louis est avocat au Parlement de Paris au moment le l’achat de la seigneurie du Roujou. Il avait épousé en 1770, à Paris, Anne Louise Charlotte Francoise Richou, née vers 1748.

Joseph-Louis Richou était toujours avocat au Parlement de Paris, au titre de 1789, sur le dernier rôle établi au début de la Révolution.

Louis Richou décède au Château du Roujou le 7 octobre 1780 et un inventaire après décès est effectué le 17 octobre suivant, ainsi qu’à son domicile parisien.

Sa fille est sa seule héritière. Elle devient donc copropriétaire avec son mari.


Les Leconte-Richou et Terre-Neuve :

Parions que depuis plusieurs siècles, aucun de ses propriétaires n’a mis les pieds à Terre-Neuve, 

avant l’arrivée des Richou-Leconte.

Aucun nom n’apparaît comme parrain, marraine ou témoin sur les registres paroissiaux de Monthou.

Les actes  d’Aveu, Foi et Hommage étaient devenus depuis longtemps une simple procédure juridique sanctionnée par un acte notarié. Ce qui intéressait le seigneur suzerain, c’était la perception de ses droits lors des ventes et successions.

Le type de terre à vocation agricole, dépourvue de lieu habitable digne d’un seigneur, comme Terre-Neuve, était donc avant tout une source de revenus avec le recours aux baux à ferme 3,6,9 ou plus rarement à moitié.

Terre-Neuve, baillée à ferme :

Grâce aux registres paroissiaux, nous savons qu’un Jacques Boistard est fermier de Terre-Neuve, époux de Catherine Jacquin , en 1752.

Le bail est renouvelé en 1773 à un Jacques Boistard, le même où son fils ; effectivement, il est qualifié en 1775 « de laboureur et fermier de Terre-Neuve.

C’est à son gendre François Joudon, originaire de Thésée, marié à Henriette Boistard, que Joseph Louis Leconte renouvelle le bail le 18 décembre 1781.

Le bail précise que sont concernés « le lieu de Terre-Neuve avec deux métairies contiguës ( plus l’énumération habituelles sur les dépendances et les terres qui reprend celle de l’acte de vente de 1777 ). Qui sont ces deux métairie contigües » ?

 La Raudiere , car nous savons qu’elle était rattachée à Terre-Neuve ?

Le Petit Combloux, l’ancien fief de ce nom pour lequel les possesseurs  du Roujou et de Terre-Neuve ont prêté Foi et Hommage jusqu’en 1594, date à laquelle « les bâtiments tombés en ruine », le fief a été réuni à Terre-Neuve », qui pourrait être la ferme qui s’appelle « La Chapelle », effectivement proche du bâtiment du Grand Terre-Neuve.

Ou le bâtiment de ce qui bientôt va être appelé le Petit Terre-Neuve qui peut être est le Petit Combloux.

En dehors des actes de Foi et Hommage, le nom du Petit Combloux n’apparaît nulle part. 

L’ensemble de ces trois composantes est bâillé pour la somme de 500 livres, 12 chapons, 12 poulets, 6 livres de beurre pour partie à la Toussaint puis à Noël.

Henriette Boistard meurt le 15 juin 1792 et son mari François Joudon, le 1e août 1796.

Je n’ai pas trouvé d’éléments sur ce que devient Terre-Neuve jusqu’en 1802.

Terre-Neuve : apparition des appellations Grand et Petit.

Le 21 janvier 1803, la Raudiere fait l’objet d’un bail à part « ...réunie à celle de Terre-Neuve, aujourd’hui divisée par le présent bail » ; au prix de 150 francs, plus les habituelles victuailles et « deux journées de charroi ».

Le 21 mars 1803, pour la première fois apparaissent les dénominations de « Petit et Grand Terre-Neuve dont le bail maintient l’unité sous le nom de « domaine et métairie du Grand et du Petit Terre-Neuve ». Le prix du bail est de 350 francs plus les compléments en nature traditionnels. Leconte se réserve l’utilisation de certains bâtiments.

Ce bail prend effet rétroactivement au 1e décembre 1802.

Le fermier est Alexandre Tessier avec sa femme Marie Fameau. Dans un inventaire de 1804 des croix existantes sur des lieux de la commune, nous apprenons qu’une croix appartient au fermier de Terre-Neuve.

Et c’est celui qui se fait maintenant appeler Leconte-Roujou qui signe ! 

 En 1804, Terre-Neuve devient la propriété de « la veuve Leconte-Roujou » :

Joseph-Louis Leconte décède au château du Roujou le 12 octobre 1803. Depuis 1795, il avait été nommé commissaire du gouvernement auprès du tribunal de Blois. Il était comme tant d’autres membres des professions juridiques monté dans le train de la Révolution ! On relèvera toutefois que sa promotion intervient au moment du Directoire et du reflux révolutionnaire !

Sa succession est enregistrée le 6 avril 1804. Elle ne comprend pas l’essentiel du patrimoine immobilier car la moitié est un bien propre de sa femme et elle détient l’usufruit de l’autre moitié.

Ainsi le cadastre de Monthou inscrira en 1821, « la veuve Leconte-Roujou » comme propriétaire de Terre-Neuve.

Le 27 janvier 1816, le bail au bénéfice de Alexandre Tessier est renouvelé, en y incluant à nouveau la Raudiere. La veuve Leconte réitère les réserves sur l’utilisation de certains bâtiments, notamment à usage de son closier. Ce qui nous apprend que Terre-Neuve, comme beaucoup de domaines ont fait monter en charge leurs production viticole au XVIIIe siècle et associent de plus en plus cultures céréalières et une production viticole souvent destinée à la consommation des propriétaires.

En 1818, les événements vont s’accélérer :

Le 22 mai 1818, sa veuve et les héritiers de Joseph Louis Leconte donnent procuration à Jacques Lambert Lecomte pour vendre les terres qui relèvent de l’ancienne seigneurie du Roujou. 

Ce Lecomte   avec un m et sans parenté ( du moins à première vue ) avec ses mandants, est une vieille connaissance. 

Il fut le dernier notaire de la châtellenie du Gué-Péan, grand acheteur de biens nationaux, receveur de l’Enregistrement à Montrichard et maire de la ville. 

Dès le 1er Juin, il résilie le bail du fermier Alexandre Tessier.

Le 3 juin, il assiste à la détermination des bases de règlement entre la veuve Le note et autres héritiers. Ce document précise que la dot du fils est hypothéquée sur Terre-Neuve et en donne la superficie : 80 hectares de terres labourables ; 45 hectares de bois ; 2,5 hectares de près et 1,75 hectares de vignes.

Jacques Lambert Lecomte va procéder durant des mois aux ventes des autres terres, vignes, bois et taillis.

La vente morceau par morceau de l’ancienne terre du Roujou :

L’ancienne terre de Terre-Neuve va être fractionnée en trois parts.

Le 21 octobre 1818, le Petit Terre-Neuve est vendu à Sylvain Henault fils pour 6 400 francs.

Le 29 novembre 1818, la Raudiere devient la propriété d’Alexandre Tessier, par voie d’ échange avec une maison dans le bourg de Monthou et un emprunt de 3 900 francs à Lecomte, hypothéqué sur la Raudiere.

Le 29 octobre 1819, le Grand Terre-Neuve est vendu à Silvain Bonnet père pour 6 182 francs.

Les destinées des enfants Leconte :

Anne Louise Charlotte Francoise Richou décède à Blois le 29 janvier 1828, laissant pour héritiers :

Désiré Louis Joseph Leconte de Roujou, la famille a repris la particule !

Anne Francoise, veuve Moulnier

Anne Jean Baptiste, épouse Druillon

Alexandrine Joseph, épouse Moricet

Marie Madeleine, épouse Lauverjeat

La famille Leconte va d’abord poursuivre la tradition familiale de carrières dans la Justice mais aussi la politique.

Les filles, au moins deux, épousent des magistrats.

Désiré Joseph Louis ( 1786-1862 ) sera avocat à Blois, puis substitut et procureur du Roi à Blois. Il sera aussi conseiller général du canton de Contres de 1833 à 1845.

Son fils Charles Henry Louis ( 1814- 1899 ), avocat et magistrat lui aussi, sera conseiller général toujours du canton de Contres de 1848 à 1852.

Outre des militaires, la famille Leconte de Roujou comprendra aussi un artiste peintre assez renommé, Louis Auguste Gabriel Leconte de Roujou ( 1819-1902 ).

Le Petit Terre-Neuve : de 1818 à nos jours, une transmission en ligne directe.

Il s’agit d’une situation assez exceptionnelle après la Révolution. 

La fin du droit d’aînesse, l’égalité filles-garçons pour les successions, la baisse de la rente foncière, la diversification des métiers, l’attrait de carrières à la ville, sont autant de causes de l’éclatement et la parcellisation de ces  grandes exploitations.

Le Petit Terre-Neuve va traverser ces obstacles par des successions majoritairement transmises par les femmes et des ménages qui vont maîtriser leur fécondité.


La souche familiale : les Hénault.

Hénault, quelle que soit l’orthographe, est un patronyme répandu dans les communes environnantes.

Les nôtres appartiennent à une vieille famille de Monthou. Ce sont des laboureurs. On en trouve dès le 17ème siècle aux Landes et à la Varenne.

Certains auront des alliances avec des filles de Montrichard, Pontlevoy, Bourré ( Vineuil ).

Ils s’appellent pour un de leurs prénoms, Sylvain de père en fils.

Les Hénault-Minier :

Notre Hénault acheteur naît en 1790 à Pontlevoy où son père Sylvain Hénault, laboureur à la Varenne, a épousé sa mère, Marie Poulain. Elle lui laissera en 1805, une coquette somme d’argent qui a dû contribuer à financer l’achat du Petit Terre-Neuve, peu éloigné de la Varenne.

Il avait épousé en 1813, Thérèse Victoire Minier, fille de Charles Minier. Ce Charles Minier est originaire d´une famille de meuniers de Genillé ( Indre et Loire ). Il est l’important meunier du moulin Rolland à Monthou et son frère Pierre est lui le meunier du moulin de la Coudre, sur l’actuelle route du Château. Charles Minier est très représentatif de ces catégories et métiers ruraux qui accroîtront leur patrimoine foncier sous la Révolution et fourniront les élites communales. Il fut maire de Monthou de longues années.

Le couple Hénault-Minier s’est installé et exploite le Petit Terre-Neuve. L’acte de vente en dessine les contours : « les bâtiments du Petit Terre-Neuve consistant en chambre, grange, écuries et généralement tous ceux qui sont sur le dit lieu savoir desserre, cours, jardins et pâtis, ensemble les arbres complantés dessus, à l’exception de deux chênes marqués qui sont vendus ». L’ensemble des bâtiments couvre une superficie de 85 ares et 9 centiares. A cela s’ajoutent terres, bois et vignes qui équivalant à environ 20 hectares. Les récoltes en cours ou proches seront partagées par moitié avec le fermier Tessier.

Le couple a trois enfants.

En 1847, les parents vont procéder à une donation-partage à leurs enfants.

Les immeubles à partager sont estimés à 90 000 francs.

Les Ricard-Hénault :

C’est Henriette Victoire qui a épousé en 1843, Gilles Ricard originaire de Choussy, qui tire le lot nº1 dans lequel se trouve le Petit Terre-Neuve. Son frère Sylvain Florent tire le lot nº2 avec la maison de la Varenne  et son autre sœur épouse de Victor Deniau ( qui sera maire de Monthou) le lot nº3 avec une maison « sise près du bourg au lieu appelé Mal à Propos ».

Il faut souligner la fréquence au XIXe siècle de ces donations partages qui permettent de maitriser les successions, d’établir les nouvelles générations et d’apporter sous forme d’usufruit ou de rente une sécurité financière aux donateurs. Y avait-il eu un tirage au sort réel ou une entente préalable ?

On constate ici que Terre-Neuve jouxte pratiquement les terres des Ricard, une importante famille de laboureurs, sur Choussy ; que la Varenne est le lieu souche des Hénault de père en fils ; et qu’une maison tout près du centre bourg sera utile à Victor Deniau, négociant en vins ! Disons que le hasard a bien fait les choses !

La surface totale des bâtiments est la même. Mais l’acte de donation en détaille la composition : « deux chambres à feu, écurie, bergerie, grenier sur le tout, couvert à tuiles, grange ouvrant sur la cour, vacherie au midi, boulangerie, petite écurie y tenant, toit à porcs, deux petits         derrière ».

Il semble bien qu’entre la date d’achat en 1818 et celle de la donation trente ans après, les aménagements ont été apportés aux bâtiments avec notamment une chambre à feu supplémentaire.

Signalons au passage, qu’il y a quelques décennies à peine, c’était le nombre de « chambres à feu » - c’est à dire les pièces d’habitation contenant une cheminée - qui symbolisait l’importance d’un héritage. J’ai souvent entendu citer le cas d’une héritière de Monthou, dans les années d’après-guerre, aux « 32 cheminées », ce qui représentaient pas mal de maisons !

Gilles Ricard et sa femme décéderont, les deux à Terre-Neuve, lui en 1894 et elle en 1898.

Les Bouges-Ricard :

Marie Victorine Ricard, née à Choussy en 1845, avait épousé en 1872, un cousin natif de Saint-Georges, Anselme Florentin Bouges. Il a deux ans de moins. En effet, la mère de son mari, une Deniau de Monthou, était la sœur de sa tante mariée à Victor Deniau, le négociant en vins. Les Bouges étaient de gros propriétaires de vignobles sur St.Georges et les environs.

Le jeune couple s’installe au Petit Terre-Neuve avec les parents de Marie Victorine.

1878 est une année importante.

Il y a la naissance de leur fille Marie Thérèse Florence Bernadette, le 1e août.

Le 24 janvier 1878, Henriette Victoire Henault-Ricard avait fait donation à sa fille Marie Victorine des bâtiments et dépendances du Petit Terre-Neuve qui sont son bien propre.

La même année, le jeune couple fait agrandir la partie du bâtiment d’habitation en la doublant de surface.

Gilles Ricard et sa femme acquièrent par ailleurs, et rebâtissent, la maison juste à l’entrée du centre bourg, en face de l’ancienne boulangerie, appelée Château Gaillard, qui était un ancien relai de poste.

Les recensements de 1876, 1881, 1886, 1891, 1896, 1901 attestent la présence des deux générations ensemble à Terre-Neuve.

A la mort de sa femme, en 1904, Anselme Florentin s’installe dans sa maison du bourg où il décèdera en 1919. Nous savons par le témoignage de Octave Henault dans son petit ouvrage manuscrit sur Monthou, qu’Anselme Florentin Bouges était instruit, passionné par l’histoire locale, la géologie, etc. Il a passé de nombreuses heures, des années durant, à relever noms, dates et faits sur les registres paroissiaux et archives communales, aujourd’hui disparus en nombre. Rien ne nous est parvenu. La famille dit n’avoir rien trouvé. Quelle perte pour la mémoire collective de la commune !

Les Bouge-Bouges :

Le 3 Juillet 1899, Marie Thérèse Bouges, avec un S, épouse Louis-Jean Bouge, sans S. Il est né à Montargis en 1870. Or, c’est bien un cousin au second degré, appartenant à la famille Bouges de St. Georges. Une omission de S a dû se produire dans l’état-civil de cette branche !

Il est alors « dans la réserve de l’armée active », aucune profession n’est mentionnée ; par contre son père Louis Charles Bouge est lui dit « sans profession » et aucune référence à une qualité de « propriétaire » n’apparaît,  ce qui était la formule classique dans ces catégories sociales. La famille Bouge est domiciliée à Loché en Indrois ( 37 ).

Dans le recensement de 1901, Louis-Jean est qualifié de « propriétaire, vigneron » et « patron », car outre des domestiques, il a des employés qui sont logés dans les dépendances.

Un fils naît en 1901, Georges Florent Victor Bouge. A peine marié en 1927 et père d’une petite Jacqueline âgée de 1 an, il meurt du tétanos en 1929.

Sa jeune veuve Florence Victoire Guérive de Chisseaux (37), se remariera avec Gilbert Bonnet, de la dynastie des Bonnet, meuniers de la Crémaillère.

Nous allons ci-dessous reparler d’eux.

Les Lucas-Bouge :

C’est donc Marie Thérèse Bouges, épouse de Louis Jean Bouge, qui transmettra son bien propre, le Petit Terre-Neuve, à sa petite-fille Jacqueline Bouge.

Jacqueline Bouge avait épousé en 1950, Georges Albert Lucas, d’une famille de Monthou.

Elle était couturière au moment de son mariage.

Le couple s’installera et exploitera le Petit Terre-Neuve.

Marie-Thérèse, la grand-mère, y décèdera en 1962, à 84 ans.

Madame Lucas, veuve depuis peu, y réside toujours à 90 ans, incarnant la cinquième génération de la même famille au Petit Terre-Neuve.

Le Grand Terre-Neuve : un exemple de patrimoine foncier d’une famille de meuniers.

Un investissement foncier :

Le 25 janvier 1819, Sylvain Bonnet père, meunier au moulin Ferrand à Monthou ( existe toujours  sur la route des Caves ) achète d’abord environ huit hectares de terres, faisant partie de la terre du Roujou et situées près du Grand Terre Neuve, pour 4 020 francs.

Puis, le 29 octobre 1819, le même acquiert les « bâtiments du Grand Terre-Neuve, tant pour le logement du maître que pour l’exploitation, cour, jardins, fosses et cheneviere sans réserves, situés commune de Monthou, pâtureaux et friches, le tout en un seul tenant contenant environ un hectare quatre vingt trois ares / 3 arpents ». A cela s’ajoute, une vingtaine d’hectares de terres,  bois, etc. Le tout pour 6 132 francs.

Mariages entre meuniers : les familles Bonnet-Carré 

Les Bonnet sont à l’origine des viticulteurs au «village de La Croix », près de l’actuelle villa Ariane,  un des plus anciens lieux de vie de la commune.

En 1793, Sylvain Bonnet épouse Marie Madeleine Germain, fille de Louis Germain, meunier du moulin de la Crémaillère. Ainsi débute la dynastie des meuniers Bonnet.

Le moulin Ferrand lui avait été vendu comme bien national du clergé. Il appartenait au chapitre de St. Aignan et faisait partie des bénéfices du chanoine Aignan Bry, qui avait acheté la Closerie de la Croix.

La famille Bonnet va croiser les destinées d’une autre famille de meuniers, les Carré. 

En 1814, Louis Brutus Bonnet, fils du précédent, meunier à Ferrand, épouse Genevieve Carré, dont le père René Carré est meunier à Fresnes, le frère René meunier aussi à Fresnes. L’un au Moulin de Roujou, l’autre au Moulin Davis. Le grand-père, un autre René est laboureur à la Chambaudiere à Monthou. Fresnes est sur la terre du Roujou des Leconte et la Chambaudiere à quelques centaines de mètres de Terre-Neuve. Ceci peut expliquer cela, c’est à dire l’intérêt des Bonnet  pour le Grand Terre-Neuve.

En 1817, Sylvain Bonnet, frère du précédent, meunier au moulin Ferrand, épouse Silvine Carré, fille du même  René Carré qui avait débuté  meunier à Mareuil où il avait épousé la fille du meunier Legendre.

En 1825, une autre fille Bonnet, Marie Madeleine, épouse Etienne Carré, fils des précédents, lui aussi meunier à Fresnes au moulin du Roujou.

On sait que l’endogamie professionnelle est importante aux siècles précédents notamment dans des métiers spécialisés qui nécessitent apprentissage et transmission des savoirs. Les meuniers en font partie, de manière significative !

Le Grand Terre-Neuve : la propriété éclatée.

Sylvain Bonnet le jeune, l’époux de Silvine Carré meurt à 25 ans en 1822.

Puis, c’est au tour de Sylvain Bonnet l’aîné en 1829.

En 1832, Sylvain Bonnet père, qui s’était mis à exploiter le Grand Terre-Neuve, le donne en bail à moitié pour 6,9 ans à Thomas Pichard, laboureur à Angé. Chacun aura la moitié « du gros et petit grains ». Le bailleur se réserve une pièce et l’utilisation de locaux.

Puis, en 1834, le couple Bonnet père-Marie Madeleine Germain vont procéder à une donation partage. 

Celle-ci concerne :

-Les enfants du premier mariage de Silvain Bonnet  : Cyr qui est mort sans descendance et Sylvain l’aîné décédé donc en 1829. Sa veuve Rosalie Bonnet s’est remariée mais le couple avait 6 enfants).

Les enfants de son mariage avec Marie Madeleine Germain : Sylvain le jeune lui aussi décédé qui laisse deux filles Silvine Désirée et Henriette Marianne de son mariage avec Silvine Carré ( remariée avec un vigneron de Sassay ) ; Marie Madeleine Bonnet, épouse de Etienne Carré et Louis.

Quatre lots sont constitués

Le lot N°1, constitué entre autres d’une portion de Grand Terre-Neuve va aux deux mineures Silvine Désirée et Henriette Marianne.

Le lot N°2, constitué de l’autre portion va à Marie Madeleine Bonnet.

Le Lot N°3, constitué de la Closerie de la Bocagerie ( un propre de la succession des parents  de Sylvain Bonnet père ) va à Louis Bonnet fils.

Le lot N°4, de l’argent, va aux enfants de Sylvain Bonnet l’aîné.

Ainsi, dans le cas de cette donation partage, le nombre des héritiers a conduit à la partition de la propriété du Grand Terre-Neuve.

Sylvain Bonnet père décèdera quelques six mois plus tard, en octobre 1834

Louis Bonnet : une stratégie de rachat du Grand-Terre :

Louis Bonnet, son fils, va mettre en œuvre une stratégie de rachats intra-familiale pour reconstituer l’unicité de propriété du Grand Terre-Neuve.

En 1840, il y aura le règlement des soultes entre les héritiers, c’est à dire l’ajustement final de ce qui est dû à chacun.


En décembre 1841, par voie adjudicataire, Silvine Désirée et Henriette Marianne Bonnet vont revendre ce dont elles avaient hérité, sous forme de lots. Presque tous, dont les bâtiments ( 2 494 francs )  et une bonne partie des terres  sont adjugées à Louis Bonnet ( 13 665 francs). Le reste  ( environ 4 000 franc) à d’autres adjudicataires dont 2 lots à Louis Carré, son cousin, meunier au moulin du Roujou.

Et en 1859, Marie-Madeleine Bonnet qui est maintenant veuve de Etienne Carré et ses enfants Jacques René , meunier au moulin de Davis et Louis Sylvain meunier à celui du Roujou, vendent l’autre portion du Grand Terre-Neuve à Louis Bonnet, toujours fermier à la Crémaillère.

Louis Brutus Bonnet décède à 66 ans « en sa maison de la Crémaillère ». Le prénom de Brutus qui est officiellement son premier prénom traduit bien le soutien de ces familles à la Révolution. Puis, évolution politique aidant, il sera appelé Louis en premier !

Brutes Louis restaure la maison d’habitation du Grand Terre-Neuve. On y retrouve l’architecture de ces grandes bâtisses de maître, ou à vocation officielle ( Mairie, école, etc. ), typiques du style Napoleon III dans notre région. 

Un macaron sur la façade arrière contient une sculpture reproduisant d’ailleurs l’Empereur.

Il faut avoir à l’esprit que la plupart des familles de notables dans notre zone qui furent partisans de la Révolution de 1789, seront très hostiles au retour des Bourbons, de faibles soutiens de la monarchie de Louis-Philippe, des soutiens à la seconde République puis au Second Empire, toujours par hostilité à toute possibilité de retour de la monarchie, vécue comme un danger de remise en cause de la vente des biens nationaux et de l’acquisition des libertés citoyennes.

De plus, en raison de sculptures décoratives de type XVIIIe, visiblement rapportées au dessus des fenêtres, on peut penser que la bâtisse avait dû être déjà aménagée par les Richou-Leconte et que des matériaux ont été récupérés et réutilisés.

Le couple Minier-Bonnet :

L’endogamie familiale se poursuit avec le mariage en 1859, quelques mois avant la mort de Louis de sa fille Louise Francoise Désirée avec Mathurin Hercule Victor Minier. Il est le petit fils de Charles Minier ( voir ci-avant ) et fils de l’actuel meunier de Rolland, Mathurin Hercule Minier.

Après le décès de son mari, Genevieve Carré opère en octobre 1860, une donation partage entre ses deux enfants. Le tirage au sort fait, une nouvelle fois, fort bien les choses : Louis Sylvain tire le moulin de la Crémaillère, où il habite et travaille. Il va ainsi y poursuivre l’activité des Bonnet.

Sa sœur qui demeure déjà au Grand Terre-Neuve avec son mari, reçoit ce lot !Geneviève Carré décèdera à la Crémaillère où elle vit avec son fils et sa famille.En 1872, le recensement nous indique que Louise Francoise Désirée Bonnet est veuve, qu’elle est « propriétaire cultivatrice » et a trois enfants. Son mari est en effet décédé en 1870.

En 1876, elle est toujours à Terre-Neuve avec ses deux filles.

Dans le recensement de 1881, il n’y a plus signe de sa présence ni de quelqu’un de sa famille. Elle réapparaît habitant Terre-Neuve, toute seule, dans celui de 1886, et il est précisé en marge qu’elle est « divorcée ». 

Effectivement, elle s’était remariée en 1881 avec un vigneron veuf de Monthou, Sylvain Gandon,  dont elle divorce à sa demande en fin 1885. La loi Naquet sur le divorce date de 1884 ! Et le divorce est prévu seulement pour des cas lourds : adultère, sévices, excès, condamnation. Les cas de divorces seront rarissimes à Monthou avant la guerre de 14-18.

Le couple Lamy-Minier :

En 1878, leur fille Désirée Marie Minier épouse Joseph Valentin Lamy. 

Il a 25 ans. Elle a 18 ans. Il appartient à une famille de vignerons, au village bien nommé des Caves.

Leur contrat de mariage correspond à l’architecture de la plupart des contrats de mariage du XIXe siècle dans ces catégories rurales : le régime de la communauté réduite aux acquêts, exclusion des dettes, apport des habits, quelques bijoux et linges, quelques petites parcelles de terre. Ils contiennent rarement une clause de donation au dernier survivant et jamais de bâtiments et de terres significatifs du patrimoine, à titre d’avance sur hoirie.

C’est le recensement de 1891 qui acte la présence à Terre-Neuve du couple Lamy, alors parents de deux enfants. Dans celui de 1906, ils en seront à 7 enfants vivants.

Nous manquons d’éléments précis sur la suite.

Le cadastre permet d’établir que le Grand Terre-Neuve à dû être vendu vers 1927/28.

Plusieurs propriétaires vont se succéder à cadence rapprochée.

Puis en 1938, c’est Raymond Pasnon, un agriculteur originaire de Courmenin en Sologne qui rachète la propriété.

Son fils Robert prendra sa suite sur une partie, celle où se trouve la maison d’habitation et son autre frère Jean sur une autre partie où se trouve l’ancienne dépendance dite La Chapelle. 

Un autre de ses fils, Pierre, sera pendant longtemps le garde-champêtre de Monthou.

C’est aujourd’hui sa petite-fille qui habite la demeure sans exploitation agricole.

Thérèse Gallo-Villa

Septembre 2018

Remerciements

Je tiens à remercier Madame Vve. Jacqueline Lucas et Eliane Pasnon ainsi que son conjoint Jean-Claude Boucher pour leurs informations, leur aide et leur autorisation à accéder et visiter leurs propriétés lors des « 4 Heures du Patrimoine » de Monthou le 15 septembre 2018, dans le cadre des Journées Nationales.

Ce texte a servi de fil conducteur à la Conférence faite sur site ce jour-là.

Sources :

Les principales sources utilisées sont :

Les registres paroissiaux et d’Etat-Civil correspondants aux différents personnages ici concernés.

Aux Archives Départementales 41 :

Les registres du Cadastre de Monthou.

Les notaires ( Pontlevoy, Montrichard, Contres, Blois, etc)

Les livres et sites sur les seigneuries, châteaux et familles ici étudiés : Fougères, le Roujou, etc.

La documentation et de précédentes recherches de l’auteure, dont plusieurs sont publiées sur le site tharva.fr.