Monthou-sur-Cher à l’aube de la Révolution.

Le 22 février 1787, s’ouvraient dans l’Hôtel des Menus Plaisirs à Versailles, les travaux de l’Assemblée des Notables convoquée par Louis XVI. (1)

Le 5 mai 1789, s’ouvraient les Etats Généraux.

C’était le commencement de la Révolution.

27 mois séparent ces deux événements majeurs.

Au cours de cette période, l’histoire politique et sociale s’accélère.

L’absolutisme royal est en butte à la volonté des ordres privilégiés de revenir aux principes initiaux de la royauté, à leur refus obstiné de toutes remise en cause même minime de leurs privilèges.

La crise budgétaire et économique est très profonde. Ses conséquences pèsent lourdement sur les populations.

Les calamités climatiques vont alourdir le fardeau fiscal pesant sur les populations des villes et des campagnes. La faim, la misère, la crainte de la famine font surgir parmi les représentants du pouvoir royal et de l’aristocratie dans le département de Blois et Romorantin, les craintes de la révolte populaire.

Monthou-sur-Cher, paisible paroisse solognote à l’écart des grandes voies de communications, n’est pas épargnée.

La municipalité nouvelle, est prise dans le tourbillon politico-social caractéristique de cette période.

I) Une paisible paroisse solognote.

A l’aube de la Révolution, Monthou-sur-Cher est une des 77 paroisses de l’élection de Romorantin.

Elle dépend de la Généralité d’Orléans, l’une des plus vastes du royaume.

Géographiquement, elle est incluse dans cette partie de l’Orléanais "bornée au nord par la Loire ; à l’est par la ligne dans laquelle sont situés Chatillon-sur-Loire, Concressault, Henrichemont et Vierzon ; au midi par le Cher ; à l’ouest par Montrichard, Pontlevoy et Blois", qualifiée de "triste Sologne ».

En application de l’ordonnance royale du 8 juillet 1787, la paroisse est administrée par un Syndic et une Assemblée Municipale élus au suffrage censitaire.

Gaspard Meyssonier des Bruères, le curé arrivé à Monthou en 1785 (2), en est le chef spirituel sous la responsabilité du diocèse d’Orléans et de l’Archidiaconé de Romorantin. Il est assisté par la « Fabrique », association de laïcs en charge de l’administration du temporel de la paroisse.

Le Prieur du Prieuré de St-cyr et Ste-Julitte, sous le patronage de l’Abbaye de Beaulieu-lès-Loches, est Alexandre André le Bas, curé de la paroisse d’Orgeval (Yvelines).

Le prieuré n’est plus habité.

1°) La population de Monthou-sur-Cher.

Le rôle de la taille pour l’année 1789 porte 221 articles, soit 221 « feux ». ce qui correspond à une population comprise entre 994 et 1105 habitants, selon que l’on considère qu’un "feu" regroupe une famille de 4 ou de 5 personnes.

La comparaison avec des paroisses limitrophes : Pontlevoy 302 feux, Bourré 180 feux, Thésée 157 feux, Choussy 44 feux, nous permet d’ affirmer que c’est une paroisse agricole bien peuplée.

Montrichard 470 feux, Contres 328 feux et St-Aignan constituent les 3 pôles urbains.

Nous disposons de peu d’éléments pour apprécier la réalité économique de la paroisse.

Bien qu’incluse dans la « Sologne », sa proximité avec le Cher et sa vallée, la différencie du centre de la Sologne que les physiocrates d’alors qualifiaient de pays "aussi inculte qu’insalubre".

A) L’agriculture :

Son territoire de 3341 arpents - environ 2829 hectares - est recouvert de bois pour 56 hectares.

Les terres labourables représentent 208 hectares, le reste se partage entre la vigne, les près et la friche.

L’abbaye de Beaulieu-lés-Loches et son Prieuré Saint Cyr-Sainte Julitte, le Chapitre de St-Aignan, l’abbaye de Pontlevoy, l’abbaye St-Lomer à Blois, les seigneuries de Champflé, du Roger, du Gué-Péan, se partagent la quasi totalité des terres.

Les céréales, blés, seigles, vignes sont les cultures dominantes.

Le vignoble est important.

Composé de quelques closeries, à Champhlé, Bourré, Ferrand, aux Caves, à la Pifaudière, il se caractérise par de nombreuses parcelles de superficies modestes, voire petites.

Selon les témoignages de l’époque, le vin est de qualité médiocre !

La paroisse compte 72 vignerons, 11 fermiers, 7 laboureurs.

Des documents attestent de la présence de la culture du chanvre répandue dans toutes les paroisses, de vergers et aussi celle des pois et des haricots.

L’élevage des « bêtes à laines » supplante celle des vaches réservée à un usage familial.

La laine des troupeaux de moutons était destinée pour une grande partie aux manufactures de tissus en activité à St-Aignan.

B) L’artisanat :

Les moulins, nombreux, voisinent avec l’artisanat classique des paroisses agricoles.

Monthou compte 7 tonneliers ; 3 fagotiers ; 1 charron ; 2 maréchaux ; 2 charpentiers ; 1 serrurier ; 3 tuiliers ; 8 pierriers ; 6 meuniers.

Les pierriers exploitaient les carrières existant sur la partie de la paroisse de Bourré incluse dans Monthou, notamment dans la métairie du moulin Blanc.

Les 6 meuniers gouvernaient les moulins positionnés sur les deux rus qui traversent la paroisse : l’un, le Traînefeuilles, baptisé bien plus tard les Anguilleuses et l’autre non dénommé, mais dit « le ruisseau » sera appelé par la suite le Bavet.

C) Les domestiques et les veuves :

Les domestiques sont au nombre de cinq. Deux sont employés par le curé et trois par le marquis du Gué-Péan.

Enfin, nous apprenons à la lecture des 221 articles d’imposition à la Taille, que le nombre de veuves taillables était de 35.


2°) L’environnement économique : les arrondissements de St-Aignan et de Romorantin.

Je ne traiterai pas de la totalité du Bailliage de Blois.

Je me limiterai à quelques faits marquants de la situation des arrondissements de St-Aignan et de Romorantin.

Leur situation est à l’image de celle du royaume, en plein déclin.

A) L’agriculture,

Elle est très contrastée selon les territoires.

Bien que rattachée territorialement à la Sologne, qualifiée à l’époque par les physiocrates de "triste Sologne", de "pays aussi insalubre que stérile" qui couvre la majeure partie du territoire du département de « Blois et Romorantin », Monthou sur Cher se rapproche plus des caractéristiques du Val de Cher.

On retrouve les caractéristiques présentes dans la paroisses de Monthou.

Dans le Val de Cher, on y cultive la vigne, mais aussi des pois, des haricots et des céréales, mais aussi en petite quantité des arbres fruitiers et du chanvre.

Les « bêtes à laine » son nombreuses et paissent sur les prairies naturelles.

Le Cher facilite les échanges commerciaux.

L’arrondissement de St-Aignan se relève avec difficulté de la crise agricole provoquée par l’effroyable sècheresse de l’année 1785. Le cheptel de bêtes à laine fut décimé. L’activité des ateliers de tissus de Romorantin et de St-Aignan baissa faute de matière première.

La sécheresse fut suivie d’une production de raisin si abondante que le prix du vin s’effondra.

"Beaucoup de récoltes restèrent à faire, il y avait plus de profit qu’a les vendanger (3)."

Pour nombre de vignerons, le vin constituait le seul produit commercialisable.

La misère qui s’en suivit, entraina une réduction de la consommation et eut des retombées négatives sur le commerce et l’activité industrielle.

Le nombre des indigents augmenta. A St-Aignan, des bureaux permanents de charité furent ouverts.

De nouvelles calamités climatiques, notamment les grêles de 1788 et le rude hiver de 88-89 allaient amplifier la catastrophe.

B) Le commerce et l’industrie.

A propos du commerce, le rapporteur du « Bureau des Biens Publics » affirmait en 1787, dans son rapport sur le commerce à l’Assemblée Provinciales de l’Orléanais :

"Il serait à désirer que le commerce put se montrer à vous, sain et vigoureux au lieu de se montrer comme il est, débile et exténué ».

L’activité manufacturière est elle aussi « exténuée ».

La laine de Sologne était utilisée pour la fabrication des tapis de billard et l’habillement des troupes.

Les manufactures de draps de Romorantin sont sur le déclin depuis plusieurs années.

Thibert, Inspecteur des manufactures en indique l’ampleur, dans son rapport de 1790 : « l’importance des manufacturés de Romorantin diminuait de jour en jour, et le nombre de pièces de draps fabriquées était moitié moindre qu’il ne l’avait été autrefois » (4).

A St. Aignan, c’étaient des tissus plus communs qui étaient confectionnés.

Et 1788 s’annonce comme une année particulièrement critique pour les manufactures de Romorantin. En effet, il est envisagé de leur retirer l’habillement des troupes du Roi.

Le 31 mai 1788, elles alertent, par lettre, le Ministre de la Guerre sur les conséquence de la perte de la confection des uniformes militaires.

Le 18 juillet 1788,l e duc de Luxembourg, Président de l’Assemblée Provinciale, "fait part de ses démarches auprès du ministre de la guerre pour que les draps de la manufacture de Romorantin soient employés à l’habillement des troupes".

Dans toutes les paroisses de l’élection de Romorantin, il est procédé au tissage des toiles de chanvre plus ou moins grossier pour un usage local et familial. C’est le cas à Monthou sur Cher.

Les activités de salpêtrerie, de teinturerie à St-Aignan, de carrière de pierre à feu, notamment à Lye, Meusnes et Couffy emploient entre 300 à 400 personnes.

C) Les voies de communication.

Les routes étaient en mauvais état.

Peu de routes, 8 seulement, pouvaient être entretenues avec les fonds de la « prestation » et constitués par financements du roi pour les ponts et chaussées.

La route de Blois à Montrichard par Pontlevoy, (ancienne route Royale de Paris à Bordeaux) était dans un état d’abandon complet.

La route de Blois à Amboise et Tours par les Montils et Chaumont était construite en partie seulement.

Quant aux chemins, ils sont aussi en fort mauvais état.

Dans ces conditions, les communications, le transport des marchandises et denrées étaient fort difficiles.

La succession des calamités météorologiques, grêle de 1788, hiver et inondation de la Loire et la crue du Cher de l’hiver 88-89 vont avoir des conséquences dramatiques sur une activité économique globalement fragile.

3°) 1788-1789, une météo catastrophique.

I ) Les grêles de 1788 :

Deux orages de grêle, l’un en mai, l’autre en juillet 1788 vont ravager les cultures

Printemps 1788, le 29 mai, une averse de grêle dévaste une partie des campagnes du département de Blois et Romorantin.

Les dégâts sont considérables dans les cultures : "plusieurs propriétaires et fermiers demandèrent à être autorisés à mettre la charrue dans leurs terres pour y semer des blés noirs ou autres graines dont la saison permettait d’espérer la récolte".

La Commission Intermédiaire Provinciale accorde l’autorisation, elle charge aussi le Bureau Intermédiaire Départemental "de constater les faits et évaluer le dommage, pour mettre l’Assemblée Provinciale à portée d’accorder aux paroisses frappées de la grêle une indemnité convenable sur la remise du Roi de l’exercice 1788 ».

L’indemnisation pouvant se faire en argent ou en grains.

Eté 1788, le 13 juillet, un nouvel orage de grêle s’abat sur le département. Selon les témoignages des contemporains, il est plus terrible que celui du 29 mai.

C’est un désastre !

La Commission Intermédiaire Provinciale délégue quelques uns de ses membres, pour dresser l’état des dégâts. Elle nomme des experts pour constater, en présence des membres de la municipalité, les pertes éprouvées » (5).

Le Roi accorde pour la province, une somme "provisoire" de 30 000 livres pour venir en aide aux "cultivateurs les plus mal traités".

Les Procureurs Syndics Provinciaux demandent de distinguer " avec soins les journaliers et petits cultivateurs qui se trouvent sans ressources d’avec ceux que leurs facultés, une exploitation considérable et les remises totales ou partielles qui leur auront été faites par les propriétaires de leurs fermes, mettent dans le cas de moins ressentir l’effet des ravages de la grêle, de manière que ceux-là seuls doivent participer au secours provisoire des 30 000 l. qui se trouveront dans l’impossibilité d’ensemencer leurs terres, soit par leur situation personnelle, soit par celle de leurs maîtres qui seraient hors d’état de leur faire des avances ».(6)

La Commission Intermédiaire Provinciale prélève sur cette somme, 3 500 livres pour l’affecter au département de « Blois et Romorantin ».

3 500 livres, c’est plus qu’insuffisant au regard de l’ampleur des dégâts.

Des visites sont organisées par paroisse pour établir l’état des pertes et des secours en argent ou en grains.

A) Monthou n’a pas été épargné.

Une partie des cultures de céréales et des vignes ont été détruites par la grêle du 13 juillet 1788.

1°) Le mémoire du « Contrôleur du Vingtième ».

Robert de Charbonnière contrôleur du Vingtième "s’est transporté pour y constater partiellement les dommages que la grêle y a causé sur les récoltes".

Sur la base des déclarations des propriétaires, il visite les parcelles concernées, accompagné de membres de la municipalité.

Le 7 octobre 1788, il rend son mémoire dans lequel il dresse l’inventaires des pertes et le niveau des indemnités pour chaque parcelle.

Les aides interviendront sous la forme d’une décharge sur l’impôt du vingtième portant sur le biens-fonds.(7)

Le bien-fonds définit la propriété comprenant le sol et tout ce qui en dépend en superficie et en profondeur (8).

Ce fut la première indemnisation financée par les resources fiscales.

a) L’ampleur des dégâts selon le contrôleur

50 parcelles détenues par 47 paysans sont concernées.

Ces sont les vignes qui ont le plus souffert, 45 parcelles de vignes pour 5 de « bled ».

Selon l’estimation du contrôleur, 5 sont détruites en totalité, 29 au trois-quarts, 10 à la moitié, 1 au quart, 2 au tiers, 3 au deux-tiers.

Soit, au total plus de 31 arpents (9) et 48 boiselées (10) qui sont considérés comme détruits.

b) Les propositions de décharges.

La perte globale est évaluée à 1290 Livres.

L’indemnisation prend la forme d'une décharge proportionnelle à la perte estimée pour chacun des propriétaires, d’un montant global de 141 L et 18 sols soit environ 11 %, au titre de l’année 1788.

Elle se fera en deux fois par tranche de 6 mois : soit 70 livres 19 S pour les 6 premiers mois ; et une décharge identique pour les 6 derniers mois.

2°) Une nouvelle aide royale

Quelques jours plus tard, « le Roi envoie 50 000 l pour les pauvres cultivateurs de cette généralité ruinés par la grêle et l’intempérie des saisons ».

Sur l’aide royale, la Commission Intermédiaire Provinciale prélève 30 000 Livres, sommes réparties et adressées aux Bureaux Intermédiaires des 5 départements.

20 000 Livres sont en attente de renseignements pour les départements les plus éprouvés.

Le Bureau Intermédiaire du département de « Blois et Romorantin » perçoit 3500 livres de plus avec pour consigne de prioriser les paysans solognots.

Le 7 Janvier 1789, les 20 000 livres en attentes sont réparties : le Bureau Intermédiaire de Blois et Romorantin, reçoit à nouveau 3500 livres.

On notera que la faiblesse des aides royales pour le département Blois-Romorantin dont la Sologne, malgré les gros dégâts subis, témoigne aussi de leur état économique médiocre.

II ) L’hiver 1788-1789.  

1° ) Neige et gel :

L’hiver 88-89 fut terrible !

La neige et le gel paralysent l’activité.

La quasi totalité des rivières et des ruisseaux sont gelés.

Les routes et chemins, déjà en très mauvais état, étaient devenus impraticables.

Les marchandises, notamment les grains, ne peuvent plus circuler. Les échangent entre la ville et les campagnes et inversement, étaient interrompus.

Les journaliers des villes sans travail ne peuvent se rendre dans les campagnes pour y trouver une tâche et les journaliers des campagnes, eux aussi en chômage, affluent dans les villes en espérant y trouver des actions de charité pour survivre.

Romorantin compte 1500 pauvres augmentés des habitants des campagnes.

Les témoignages de l’époque sont éloquents :

"Nos petites rivières, seule ressource que nous ayons pour la mouture de nos grains, étant absolument arrêtées et séchées par la prolongation du froid, les moulins qui y sont placés ne peuvent plus tourner"

Il n’y a plus de farine.

Le prix du pain ne cesse d’augmenter et devient inaccessible pour la population.

Le pain blanc est vendu 4 sous 6 deniers la livre , le pain commun 3 sous 3 deniers la livre.

Ce sont des prix exorbitants !

La "famine totale menace qui interdira tous secours pour les pauvres et nous réduira dans la cruelle nécessité de les laisser mourir de faim » déclare le maire de Blois

Plusieurs morts de famine se comptent par jour.

A Blois, le froid fait des ravages..

20 décembre 1788, le maire écrit "toutes espèces de travaux sont interdites depuis plus d’un mois".

Il craint des émeutes.

Nous ne disposons pas de données particulières concernant Monthou-sur-Cher.

Il est difficile de considérer que la paroisse fut épargnée.

Les roues des moulins furent probablement prises dans les glaces des ruisseaux gelés.

Les conséquences de ce terrible hiver se cumulent avec celles des orages de grêle.

2° ) L’inondation de la Loire.

Dans la nuit du 19 décembre 1788, un nouveau désastre arrive.

La débâcle des glaces détruisit les nombreux bateaux du commerce fluvial sur la Loire.

Les piliers de certains ponts embâclés par la glace ne résistèrent pas.

Des moulins seront fracassés le long des rivières.

Le fleuve déborde et ravage la vallée.

Le maire de Blois, Besnier déclare : "la débâcle de cette rivière, aussi horrible dans son aspect que funeste dans ses effets, a menacé de la dévastation la plus entière deux de nos faubourgs et a replongé dans la misère la plus affreuse tous les habitants des quartiers bas de la ville et tous les meuniers et mariniers ».

Le Faubourg de St-Jean, Vienne et le quartier duFoix, sont sous les eaux et la glace. Le val de Blois jusqu’à Candé, St-Gervais, Chailles est inondé.

Dans les jours qui suivent, de nombreux moulins, bateaux sont détruits et perdus à Blois, Chouzy, Chaumont :  

"Le bourg a souffert un si grand dommage par les glaces que deux maisons ont été entièrement rasées, une détruite à moitié et deux autres ébranlées dans leurs fondements, dont les terres et les près dans sa varenne (11), ont été déchirés par les glaces et couverts de sables par la dernière crue".

Le bilan est lourd.

Les journaliers mariniers sont démunis et sans travail, les transports de marchandises à l’arrêt.

Je n’ai pas trouvé d’indications concernant le Cher.

Mais il serait étonnant qu’il ne fut pas en crue et que Monthou ne fut pas concerné par cette catastrophe de grande ampleur.

3°) Les débuts de l’année 1789

En ce début d’année 1789, la situation dans le département de « Blois et Romorantin » est dramatique : manque complet de récoltes ; vignes presqu’entièrement détruites par la gelée ; pertes importantes de bestiaux, vaches, chevaux, bêtes à laine, porcs et volailles ; poissons morts dans les étangs de Sologne gelés ; commerce du bétail ralenti.

Les fermiers, les laboureurs ne sont plus en état de donner du travail aux journaliers.

Certains fermiers abandonnent leur ferme.

Les journaliers se trouvent sans ressources, dans la plus grande misère, réduit à la mendicité.

L’état déplorable des chemins vicinaux, impraticables pour certains - seules voies de communication des villages avec les grande routes - aggravent les difficultés pour écouler les récoltes qui peuvent l’être encore, mais aussi pour l’achat des denrées et les choses nécessaires à la vie.

Le prix des marchandises s’envolent, notamment le prix du pain. "La cherté excessive du prix du pain, auquel une grande partie du peuple ne peut atteindre », "le prix du pain est sans borne, l’espèce manquant ; les trois quart de cette communauté sont sans pain"

Le nombre des journaliers sans travail était encore augmenté aux environs de Romorantin par les ouvriers renvoyés des fabriques.


A Saint Aignan : les officiers municipaux écrivent : "la manufacture de draps, qui fait une des principales ressources de cette ville, est actuellement anéantie, que mêmes les fabricants aisés se trouvent épuisés par les avances considérables qu’ils ont faites sans pouvoir rien vendre et se voient dans la nécessité de renvoyer chaque jour leurs ouvriers et leurs fileuses".

La quasi totalité des paroisses sont concernées par ce bilan.

Face à cette situation, les municipalités, les curés, demandent par lettres, l’établissement d’un atelier de charité dans la paroisse. 


4°) Les ateliers de charité.

Les ateliers de charité ont été créés dans la Généralité d’Orléans en 1771.

Au printemps 1789, le Bureau Intermédiaire du département de Blois et Romorantin en dispose. L’objectif initial des ateliers, « tout en faveur de cette classe malheureuse qui manque de tout, et souvent même de travail » est complété par celui de subvenir à la construction et l’entretien des chemins ruraux.

Les fonds de charité étaient accordés annuellement à la Généralité par le Roi.

La Commission Intermédiaire Provinciale et le Bureau Intermédiaire du département sont chargés de la répartition des sommes destinées aux ateliers de charité.

La Généralité reçut en 1787, 91 200 livres ; 90 948 l en 1788 ; 110 000 livres en 1789.

Pour les mêmes dates il fut affecté à Blois et Romo , 4600 livres (1887) ; 4136 livres (1888) ; 20 005 livres pour 1789.

La règle pour l’attribution définitive des fonds pour un atelier était la suivante : dans chaque paroisse, la somme prélevée sur les fonds du Roi, était égale au montant de la contribution volontaire des habitants de la paroisse.

Dans le cas contraire, l’atelier de charité était refusé.

C’est l’intendant du roi qui procédait à l’attribution ou au refus. C’est ainsi que

"L’atelier de Blois à Pontlevoy n’ayant pas eu lieu par le défaut de contribution de 1000 L promis par des particuliers, M. l’intendant; suivant sa lettre du 6 avril 1789, a accordé les mille livres de fonds du Roi aux abords d’Orléans".

La contribution volontaire ne pouvait provenir que des personnes les plus fortunées de la paroisse.

Dans les ateliers du département, le prix de la journée de travail était le plus souvent de 15, 18, 20, ou 25 sous, le plus souvent de 20 sous

Les femmes qui parfois y était admises, étaient payées 10 sous.

Les ouvriers refusèrent de travailler pour des salaires aussi bas.

"Les habitants, poussés à bout par la misère, par le manque de pain et le manque d’ouvrage, murmuraient, et l’on craignait des émeutes ».

4°) L’organisation territoriale de la Généralité d'Orléans.

Les municipalités, arrondissements, départements, furent mis en place par l’ordonnance royale de 1787.

Loménie de Brienne, présenta à l’Assemblée des notables de 1787, divers projets de réformes, parmi lesquels celle de l’administration du royaume.

Après modification par l’Assemblée des Notables, elle fut promulguée par l’ordonnance royale du 8 juillet 1787.

Il s’agissait d’une très modeste décentralisation de l’administration du Royaume, s’inspirant des réflexions du courant réformateur qui, considérait que l’administration du pays ne pouvait plus reposer uniquement sur les Ordres, que les collectivités devaient collaborer à l’administration générale en répartissant l’impôts, mais aussi, gérer les affaires locales, notamment certains travaux publics, l’assistance aux nécessiteux et les secours à apporter lors des calamités naturelles.

Les intendants royaux étaient toujours présents. Ils avaient certes perdu quelques compétences en particulier celles concernant la localité, mais ils conservaient d’importantes attributions d’ordre général. Ils représentaient toujours le pouvoir monarchique absolu qui ne souhaitait pas abandonner l’administration des provinces aux assemblées.

Cette réforme, ne mettait nullement en cause l’organisation de la société fondée sur les Ordres.


1° L’organisation territoriale

L’ordonnance royale du 8 juillet 1787, divise les généralités en  « départements, en arrondissements et en municipalités ».

La Généralités d’Orléans est divisée en trois assemblées et six départements (12).

a) L’Assemblée provinciale.

Elle siège à Orléans.  

Le Duc de Luxembourg, choisi par le Roi, en sera la Président.

b) L’Assemblée départementale.

Pour chacun des 6 départements, elle siège au chef lieu désigné par le Roi.

Le département de Blois et Romoratin qui concerne Monthou-sur-Cher, compte deux élections, celle de Blois et celle de Romorantin et chaque élection est divisée en trois arrondissements.

L’élection de Blois était composée par les arrondissent de Blois, Mer et Contres.

L’élection de Romorantin, était composée des arrondissements de St-Aignan, de Graçay et de Romorantin.

Monthou-sur-Cher dépend de l’arrondissement de St-Aignan.

Le Comte de Dufort de Cheverny présidera l’assemblée départementale du département de Blois et Romorantin.

c) L’Assemblée municipale.

Elle se réunit dans les villes et paroisses qu’elle représente.

Elle est composée d’un syndic et d’une assemblée municipale élue au suffrage censitaire.

d) Un système pyramidal.

Ces trois assemblées constituaient une pyramide dans laquelle les assemblées étaient liées les unes aux autres par le mode d’élection de leurs membres.

L’assemblée municipale était la base de cette pyramide. Les membres de l’assemblée départementale étaient élus parmi ceux de l’assemblée municipale.

Les membres de l’assemblée provinciale étaient élus parmi les membres de l’assemblée départementale.

Les députés des assemblées municipales devaient se réunir dans les arrondissements pour élire les membres de l’assemblée départementale parmi les membres de ces assemblées.

Les six arrondissements élisaient quatre députés, un de la noblesse, un du clergé et deux du tiers-état.

L’assemblée départementale du "département de Blois et Romorantin", comptait vingt quatre membres, douze étaient issus à part égale de la noblesse et du clergé et douze du tiers-état.

Ces élections n’eurent jamais lieu pour cause de tenue des Etats Généraux.

L’assemblée départementale se réunissait une fois l’an sur une durée de 15 jours.

Dans l’intervalle des sessions, c’est le Bureau Intermédiaire permanent composé de quatre membres, un du clergé, un de la noblesse et deux du tiers-état qui gérait les affaires quotidiennes à l’échelon départemental et provincial.

Les voix, lors des votes, se comptaient par tête et non par ordre.

Ils joueront un rôle important.

La présidence du Bureau Intermédiaire permanent était assuré par le président de l’assemblée départementale.

Les présidents des assemblées provinciales et départementales étaient choisis par le Roi parmi les membres de la noblesse ou du haut clergé.

La domination des ordres privilégiés était maintenue.

5 ) Taille et Accessoires dans le département de Blois et Romorantin

 

1°) La taille et les "accessoires"

La taille était un impôt personnel prélevé sur les revenus fonciers du taillable, ou un impôt réel prélevé sur les terres et les biens roturiers.

Dans un pays d’élection - subdivision des généralités - c’est l’intendant royal qui répartissait les impôts avec l’aide des élus au niveau local.

L’intendant royal était élu par les états généraux. De 1614 à 1789, ils n’avaient pas été convoqués, les intendants étaient nommés par le roi.

a) L’assiette

Depuis 1780, chaque année la somme totale de la taille et de ses accessoires, étaient fixée, pour les provinces, par le Brevet Général (16).

A partir du mois d’août 1788, la répartition de la taille entre les départements à été faite par la Commission Intermédiaire Provinciale.

b) "Les Accessoires »

C’étaient des taxes ajoutées à l’impôt principal, la taille. Elles en suivaient le régime.

2°) La capitation des non taillables

La capitation des non taillables est une imposition strictement individuelle, dont seuls les ordres mendiant et les taillable de moins de 40 sols étaient exemptés, ce sont 10 taillables, dont 9 veuves.

En 1789, la capitation des non taillables représente 1/11ème des revenus des taillables.

C’était un accessoire de la taille.

Les assujettis étaient les habitants exemptés de la taille.

Il s’agissait des nobles, des officiers de justice, des privilégiés, des employés de fermes et régies et des habitants des villes franches.

La détermination du montant de la capitation répondaient à des règles différentes de celle de la taille..  

Le montant global fixé par le brevet général.

Pour la Généralité d’Orléans, il s’élevait à 204 661 livres 11 sols 9 deniers.

Pour les Elections de Blois et Romorantin réunies à 23 637 l 4 s 6 d

Ensuite, la répartition était faite par classe :

  • Les nobles et les privilégiés : le centième de leur revenu ;
  • Les officiers de justice : la capitation variait avec leurs fonctions ;
  • Les employés des fermes et régies :

- appointements de 1000 l et plus : 6 deniers pour livre

- appointements de 400 à 1000 l : 4 deniers pour livre

- appointements de 400 l et < 2 deniers pour livre

Les officiers municipaux des villes franches étaient chargés de répartir la capitation entre les habitants de ces villes.

Les receveurs particuliers étaient chargés du recouvrement.

3°) les Vingtièmes

Le vingtième est un Prélèvement 1/20e des revenus de toutes les propriétés foncières, mobilières, revenus des professions libérales, revenus de l’industrie.

L’ Edit de septembre 1787 avait rétabli les 1/20e : L’édit royal précisait que :

Ils seront perçus sur "l’universalité du revenu des biens qui y sont soumis…sans aucune distinction ni exception, telle qu’elle puisse être, même sur les fonds de notre domaine, soit qu’il soit possédés à titre d’apanage ou d’engagement, ou même qu’ils soient entre nos mains et régis par les administrations de nos domaines, et ce dans la juste proportion des revenus effectifs qui doivent supporter lesdites impositions".

Les vingtièmes portaient sur les biens-fonds, les biens-fonds d’industries, des offices et droits.

"Les vingtièmes ont une base certaine : la propriété des biens-fonds de toutes espèces". (17)

4°) Répartition de la taille entre les paroisses

Ensuite, intervenait le « département de taille », c’est-à-dire la répartition entre les paroisses de l’élection de la somme de la taille affectée au département. Aucun critère n’était fixé pour cela. La répartition se faisait par comparaison des paroisses entre elles.

5°) La répartition entre les taillables de la paroisse.

La dernière étape étant la répartition entre les (taillables de la paroisse.

La répartition de la taille était une opération lourde et lente. En effet, aucune base commune applicable n’existait pour fixer l’assiette de cet impôt.

Selon M. de Montlivault, rapporteur du bureau de la taille à l’Assemblée départementale de 1787, « la taille s’impose sur les propriétés, sur les exploitations et sur l’industrie. » « Dans plusieurs paroisses le prix des fermes sert de base pour la répartition de la taille qui s’impose à raison de douze, dix-huit ou vingt-quatre deniers pour livres suivant les différents endroits. » « À l’égard des propriétés personnelles, il n’y a aucune règle établie pour la répartition qui est absolument arbitraire. » (18)

 

6°) Le recouvrement de la taille.

Écoutons M. de Montlivault : …. « les collecteurs sont tenus de compter du montant de ces rôles au receveur particulier des finances en quatre termes égaux :

  • Le premier, au 1er décembre,
  • Le 2e, au dernier février,
  • Le 3e , au dernier avril,
  • Le 4e , au premier octobre suivant. » (19)

La collecte était difficile : les abus des collecteurs de la taille avaient pour corollaire la volonté des habitants de ne pas la payer. Les réclamations sont nombreuses etc…


6°) L’assemblée municipale de la paroisse de Monthou.

C’était une assemblée élue au suffrage censitaire.

1) Composition

Les membres de droit.

Le Marquis du Gué-Péan, René Michel Amelot(13), représentant de la noblesse.

Le curé, Gaspard Meyssonier des Bruères représente le clergé. Ils sont membres de droit.

Les membres élus.

Les autres membres sont élus au suffrage censitaire pour une durée de trois ans.

Le nombre du collège élu était fixé en fonction du nombre de feux de la paroisse : trois élus pour moins de 100 feux ; six pour un nombre de feux compris entre 100 et 200 ; neuf au-delà de 200.

L’assemblée municipale de Monthou fut composée par neuf membres élus, en plus des membres de droit, soit onze membres au total.

2 ) Le suffrage censitaire 

Sont électeurs, les hommes qui paient au moins dix livres d’impôts.

Un nombre important de taillables sont exclus. A titre d’exemple, il y avait cent cinq personnes s’acquittant d’une taille de moins de dix livres à Monthou-sur-Cher.

Est éligible tout homme noble ou non, âgé de 25 ans révolus, domicilié dans la paroisse depuis au moins un an, payant au moins trente livres d’impositions foncière ou personnelle.

A Monthou-sur Cher, environ vint et un taillables sont concernés.

L’élection se faisait à voix haute. En effet nombre d’électeurs et d’éligibles étaient illettrés.

La première réunion devait avoir lieu le 9 septembre 1787.

Elle était donc renouvelable le premier octobre 1790.

Elle ne le sera pas pour cause de révolution.

L’assemblée municipale de Monthou s’est-elle réunie pour la première fois à la date prévue par les règlements d’application de l’Edit de 1787 ? Sans doute.

Une certitude, ses membres ont travaillé.

3 ) Les membres élus de la municipalité

Qui sont-ils ?

Jean Buffet, syndic de la municipalité.

Il administre donc la municipalité. Il sait lire et écrire.

A la date de son élection, il est le meunier du moulin de la Crémaillère depuis 1780.

Il est né vers 1742/1743, il décédera jeune en 1791.

Le 17 juin 1781, il épouse Marie Madeleine Mainfray, veuve Louis Germain, ancien meunier de la Crémaillère décédé en 1780. Louis germain et Marie Madeleine eurent huit enfants.

Avec Jean, Marie Madeleine aura une fille. Marie Madeleine, née à Thenay, décédera à Monthou sur Cher à l’âge de 84 ans.

Sa soeur Madeleine est marie avec Sylvain Henault, élu de l’assemblée municipale.

René Férandou, greffier de la municipalité. Il est issu d’une famille de tonneliers buralistes.

Charles Minier, fils de meunier, il exerce l’activité de charpentier en moulin et de meunier.

Il est né en 1765 à Monthou où il sera inhumé en 1821.

Il a épousé Catherine Thion le 17 février 1764 à Monthou sur Cher. Elle était veuve de Etienne Angier, meunier du moulin Bernet, décédé en 1762.

Il détient le bail à ferme du moulin de Bahuet qui ne tourne plus depuis longtemps.

En1787, il donne à ferme le moulin de Rolland à Vincent Masson qui prend aussi à ferme la métairie de la petite Boulaye.

En 1789, il prend à ferme l’ensemble des terres et moulins du Prieuré de St Cyr et Ste. Julitte, (prieuré de Monthou-sur-Cher)

Les branches de la famille Minier sont nombreuses. Elles constituent une véritable dynastie de meuniers.

François Joudon, laboureur et vigneron, né 1777, décédé en 1844 (14)

Maurice Berthelin, meunier du moulin de Ferrand.             

René Pinsonneau.

Il est né le 24 mars 1737 à Bourré, il épouse Marie Die (ou Dis, ou Dys) issue d'une famille de vigneron le 7 janvier 1758. Il décède à Monthou-sur-Cher le 28 avril 1805. Son activité n’est pas connue.

Nicolas Deletang : c’est un des tuiliers de Vineuil.

François Hénault : c’est un propriétaire fermier, laboureur né le 17octobre 1764, décédé le 22 septembre1840.

Le 28 janvier 1790, il avait épousé Silvine Hélène Mainfray d’une famille de fermiers.

Silvain Henault, le frère de François, 1750-1820, marié avec Marie Poulain, issue d’une famille de fermiers.

Ce sont les neuf "notables" de Monthou-sur-Cher : trois meuniers, deux fermiers et un laboureur, un tuilier, un tonnelier. Comme indiqué, on ne connait pas l’activité de Pinsonneau.

Ils sont assistés dans l’accomplissement de leurs taches par trois adjoints et deux collecteurs.

a) LES ADJOINTS :

Un Arrêt du Conseil du 8 Août 1788 stipule que chaque année, le 1er dimanche de septembre, l’assemblée paroissiale procède à la nomination de trois habitants taillables « lesquels, était-il dit, sous le titre d’adjoints, coopéreront, avec les membres taillables de l’assemblée municipale, à la répartition pour l’année suivante de la taille et de ses impositions accessoires… ».

La répartition de la taille était une opération lourde et lente. En effet, aucune base commune applicable n’existait pour fixer l’assiette de cet impôt.

Pierre Besnard, adjoint, meunier, né le 13 juillet1716 à St Jullien de Chedon. Il décède 8 décembre 1798 à Monthou. Il épouse le 26 juin 174, à Monthou, Marie Caillau née le 7 avril 1720, décédée le 13 avril 1794 à Monthou. Ils eurent 6 enfants, dont Marie Besnard qui épousera René Carré, lui aussi meunier de la Crémaillère.

Pierre Germain, adjoint, né en1743, décédé en 1810. C’est un laboureur marié avec Madeleine Fouassier (1749-1927) le 18 novembre 1769, fille du meunier du moulin d’Assenet.

Les Germain constitue une famille nombreuse : le père Louis, meunier, était marié à Jeanne Bléré, fille de meunier.

b) LES COLLECTEURS OU "ASSÉEURS"

Ils procèdent à la collecte de la taille chez les taillables.

Selon M. de Montlivault, rapporteur du bureau de la taille à l’assemblée départementale de 1787 :« Chaque année on fait lecture, dans l’assemblée paroissiale convoquée à cet effet, des noms de ceux qui doivent faire la collecte de l’année »(15).

Il arrivait quelquefois que le sortant nomma le nouveau.

Silvain Bonnet, collecteur, famille de meunier au moulin de la Crémaillère)

Jean Hénault, collecteur, laboureur, marié avec Françoise Mainfray.

Et, il y avait aussi un "préposay"

C’est Étienne Popineau, un vigneron.

Soit au total : cinq meuniers, quatre laboureurs, un tuilier, un vigneron.

7°) La taille à Monthou

La compétence majeure de l’assemblée communale était la répartition entre les "feux" des seules impositions royales directes, c’est-à-dire : le principal de la taille, les accessoires de la taille, les vingtièmes, les impositions pour objets particuliers à la charge des communautés et la prestation représentative de la corvée.

Les assemblées communales ne percevaient pas les aides.

Le foyer fiscal, dirions nous aujourd’hui, était le « feux ». Le père de famille était le seul taillable. A sa mort, sa veuve endossait la charge de la taille.

Les gabelles et autres impôts indirects dépendaient toujours de la Ferme Générale.
Chaque année , en janvier, était élaboré le rôle de la taille.


« Le dit rolle.. » de monthou

"Fait et arrêté en notre municipalité les dits rolles de notre communauté suivant la commission que nous avons reçus du Bureau Intermédiaire de Blois et Romorantin

Arrêté le 15 janvier 1789 en présence de Jean Buffet…. noms …..et ont signés les messieurs Buffet, Ferandou, Joudon et Berthelin et non les autres ont déclaré ne savoir le faire. Le dit rolle fait par nous syndic et greffier le plus juste que nous avons pu le faire du consentement des membres et adjoints qui ont coopéré avec nous pour la répartition, afin d’en envoyer à romorantin par devant ses messieurs que nous prions d’avoir la complaisance de les vérifier et de les rendre exécutoire"…

Ce rôle nous donne de précieuses indication sur la situation économique et sociale de la commune de Monthou.

1° Répartition de la taille et accessoires dans le département de Blois et Romorantin.


A) Deux élections inégales

Concernant l’élection de Romorantin, parmi les plus pauvres, le principal de la taille, les accessoires de la taille, les vingtièmes, les impositions pour objets particuliers à la charge des communautés et la prestation représentative de la corvée s’élève à : 320 209 L 17 S 5 d (20), pour l’année 1789.

Entre l’élection de Blois et l’élection de Romorantin, la différence est marquée.

Dans l’élection de Romorantin, le prélèvement total, taille en principal, accessoires de la taille, capitation des taillables, s’élève à 320 209 livres.

Il se décompose ainsi : Principal de la taille 149 004 L 3 d, Accessoires 78 358 L 8 s 3 d, Capitation des taillables 92 846 L 17 s 2 d.

Dans l’élection de Blois, le prélèvement total s’élève à 360 547 livres. Il se décompose de :

Principal de la taille 166 470 L, Accessoires 88 929 , Capitation des taillables 105 148 L

Soit, un prélèvement inférieur de 40 358 livres par rapport au prélèvement dans l’élection de Blois.

Sur les 27 paroisses que compte l’élection de Romorantin (arrondissement de Romorantin), les paroissiens de deux paroisses seulement, St-Aignan ville plus St. Aignan hors enclos et Chabris contribuent pour plus de 4000 livres de taille (principal) ; les paroissiens de Lye et Varenne contribuent avec plus de 2000 livres.

Les paroissiens de Monthou-sur-Cher, avec 1350 livres sont en troisième position parmi les contributeurs des 15 paroisses qui se situent au dessus de 1000 livres.

Pour l’impôt du 1/20e, Monthou-sur Cher est la paroisse la plus imposée de l’élection.

2° Monthou : les enseignements des données fiscales

1 ) La paroisse de Monthou parmi les autres

Le niveau de prélèvement nous donne une indication sur la "richesse " de la paroisse.

Si l’on se réfère au rendement global de tous les prélèvements fiscaux des 27 paroisses de l’Arrondissement de St-Aignan, la paroisse de Monthou-sur-Cher, figure parmi les trois paroisses les plus imposées aux côtés de Chèmery, Chateauvieux et Chabris.

Concernant la taille, la paroisse figurent au 7e rang et rappelons que le curé, la marquise du

Gué-Péan et un personnage non identifié sur Vineuil en sont exemptés.

Le Vingtième, rapporte 1201 L et 15 sols et place Monthou à la première place.

2 ) Répartition des taillables de la paroisse

221 articles sont portés sur le rôle. Ils présentent 2 lignes, l’une concerne le montant et l’assiette de la taille, l’autre la capitation.

Comment se répartissent les tranches des impositions ?

  • 57 % des taillables acquittent un impôt de 1 à 10 livres, capitation comprise, soit 125 taillables,

Qui sont-ils ?

- Les artisans : tonnelier, charpentier, maréchaux, plus de la moitié des vignerons : la grande majorité d’entre-eux supportent une taille et capitation de 6 ou 7 livres, ce qui peut s’expliquer par la petitesse des parcelles , Les travailleurs de la pierre, pierrier et tuilier, les domestiques, la grande majorité des femmes veuves.

  • 36 % taillables s’acquittent d’un impôt de 11 à 50 L, soit 83 paroissiens,

Qui trouve-t-on dans cette catégorie ? Des artisans, tonneliers, charron, serrurier, charpentier ; des pierriers ; des vignerons ; des laboureurs ; un meunier.

  • 6 % paroissiens s’acquittent d’une taille de 51 à plus de 100 L soit 13 : parmi eux, 2 seulement s’acquittent d’un taille de 100 livres.

On trouve dans cette catégorie : deux laboureurs ; quatre meuniers :

Pierre Bernard adjoint, meunier. Moulin 30 L 6 S ; pour « luy » 34 L.

Pierre Germain, adjoint et meunier : Moulin 38 L 5 S ; pour« Luy » 43 L 10 S.


Vincent Masson, meunier : Moulin 22 L ; « Luy » 25 L 6 S.

André Germain, meunier : 26 L ; « Luy » 29 L 10 S.

Trois paroissiens sont imposés à plus de 100 livres, il s'agit de :

        • Pierre Quentin Girard, fermier du Gué-Péan, 114 L,
        • François Joudon, 118 L (17)
        • Charles Minier, meunier, 129 L,
          • pour le moulin 45 livres
          • Pour la ferme 15 L et 10 S
          • En tout 60 L 10 s.
          • Pour « luy » 69 livree

Conclusion : cette brève description de Monthou permet d’entrevoir certains traits qui caractériseront la Révolution dans la paroisse devenue commune.

Ni pauvre, ni riche, elle traversera la Révolution sans crise sociale.

Ce calme a aussi été facilité par une faible présence de nobles la plupart du temps absents, par la redistribution foncière du clergé par la vente des biens nationaux et deux curés assermentés.

Elle illustre par ailleurs la place des meuniers dans l’échelle des revenus, leur rôle dans la jeune municipalité de 1787 et leur ascension dans les institutions issues de la Révolution et l’Empire.

Armand Villa
(4 mai 2024)

Notes .

1 - L’assemblée des notables a été convoquée en 1787 pour résoudre la crise financière du royaume. La deuxième réunion de l’assemblée des notables du 6 novembre au 12 décembre 1788, demande au Roi la convocation des Etats généraux.

2 - Gaspard Meyssonnier des Bruères et Antoine Gatignon. Thérèse Gallo-Villa, www.tharva.fr

3 - J-J Delorme Histoire de la ville de St-Aignan page 178

4 - Mémoire sur l’état actuel des manufactures d’une partie de la France, ci-devant nommée la Généralité d’Orleans … 1790 ADLC 41 Ln4-3-4

5 - ADLC C 30

6 - ADLC C 30

7 - Le bien-fonds, définit la propriété comprenant le sol et tout ce qui en dépend en superficie et en profondeur. (Gloss. de l'anc. dr. fr., Paris, 1846).

8 - Gloss. de l'anc. dr. fr., Paris, 1846.

9 - Mesure agraire : un arpens est égal à 12 bosselées

10 - Mesure agraire : une bosselée est égale à 0,5 ares 50 ca

11 - Varenne : Nom générique donné dans plusieurs régions aux sols sableux. (variante de garenne). Lieu boisé ou sablonneux où vivent les lapins à l'état sauvage. Autrefois, réserve de gibier d'un seigneur.

12 - Il s’agit des départements d’Orléans et Beaugency, de Chartres et Dourdan, de Blois et Romorantin, de Châteaudun et Vendôme, de Pithiviers et Montargis et de Gien et Clameçy.

13 - La Révolution et les péripéties du Bail de la Ferme Générale de la terre du Gué-Péan : 10 janvier 1787-19 mars 1808. Thérèse Gallo-Villa, www.tharva.fr

14 - La famille Joudon, L’histoire du Vaulx St-Georges de Thésée. www.tharva.fr

15 - ADLC C4

16 - Brevet Général : "c’était la somme fixée pour le montant de la taille de l’année à venir" (Marcel Marion, Dictionnaire des institutions…, Paris, Picard, réé. 1984.

17 - Mémoires de la Société des sciences et lettres de Loir-et- Cher , Volume vingtième 1910, page 201.

18 - ADLC C4

19 - ADLC C4

20 - S : sol ; d : denier