Dans le Loir et Cher :

La Ligne de Démarcation et la répression des Juifs

Petit rappel sur la Ligne de Démarcation

La Ligne de Démarcation est décidée et fixée dans la Convention d’Armistice signée le 22 juin 1940, qui entre vigueur le 25 juin à 0h35, car il avait fallu attendre la signature le 24 juin de l’Armistice avec l’Italie de Mussolini.

Ce n’est que le 6 août 1940 que le Délégué Général auprès de la Commission d’Armistice à Wiesbaden transmet au Préfet de Loir et Cher le « Tracé de la Ligne de démarcation » qui le 17 juillet avait réclamé des précisions, notamment pour les villes qui sont à cheval sur les deux rives du Cher.

La Ligne traverse tout le sud du département de Loir et Cher : le Cher constituant cette nouvelle frontière intérieure.

Car la Ligne concerne tous les domaines : les transports, le courrier, la localisation des avoirs, des sièges sociaux, les PTT, etc.

La zone occupée, la plus riche, et de loin, des deux zones, va permettre aux Allemands de siphonner les richesses produites en matières premières et produits finis, de réquisitionner les produits agricoles, d’utiliser une main d’oeuvre expérimentée.

La zone occupée va immédiatement être mise au service de la machine de guerre allemande.

L’ensemble du territoire est théoriquement sous l’autorité du gouvernement de Vichy.

Mais la convention d’Armistice est sans détours ni ambiguïté : « Dans les régions occupées de la France, le Reich allemand exerce tous les droits de la puissance occupante. Le gouvernement français s’engage à faciliter par tous les moyens les règlementations relatives à l’exercice de ces droits et à la mise en exécution avec le concours de l’Administration française ». Ainsi « le Gouvernement français invitera immédiatement toutes les autorités et tous les services administratifs français du territoire occupé à se conformer aux règlementations des autorités allemandes et à collaborer avec ces dernières d’une manière correcte ».

Les archives de la Préfecture de Loir et Cher sont, hélas, édifiantes : elle fut l’exécutrice des demandes et décisions des autorités d’Occupation.

Et ce fut particulièrement le cas pour la sécurité et la répression.

Il faut avoir à l’esprit que depuis plusieurs semaines avant l’Armistice et notamment face à l’avance des troupes allemandes après le début de la guerre effective le 10 mai 1940, des flots ininterrompus de réfugiés tentent de se rendre le plus loin possible des zones de guerre ou celles prêtes à être envahies.

On estime ces réfugiés ente 10 à 12 millions de personnes qui constituent ainsi « l’Exode ».

Parmi eux des Belges, des Néerlandais, des gens des régions du Nord, de l’Est, de la Région parisienne, des populations évacuées d’office.

Ainsi, le 14 juin alors que les troupes allemandes défilent à Paris, le Préfet de Loir et Cher donne l’ordre d’évacuer Blois.

Entre le 16 et le 19 juin, la bataille fait rage sur la Loire et le Cher.

Montrichard et Faverolles sont bombardées le 14 juin. On compte plusieurs centaines de morts, pour l’essentiel des réfugiés. Blois, le sera le 16, etc.

Le 20 juin, les Allemands occupent, une à une, les communes de la Vallée du Cher.

Tous ces réfugiés se trouvent bloqués sur la ligne du Cher. Ils occupent le moindre endroit pouvant servir de logement.

Les premiers passages de la Ligne seront constitués donc des réfugiés et parmi eux des Juifs de ces régions vidées de leurs habitants. On évalue à 30 % le nombre de Juifs qui retourneront chez chez eux lorsque le retour des réfugiés français sera peu à peu autorisé, à partir de fin juillet.

Mais il y aura aussi dans ces premiers passages les débris de l’armée française vaincue qui seront démobilisés en zone dite « libre » et les soldats prisonniers évadés des Fronstalags avant

La diversité de la présence juive dans le département

Au début de la guerre, est présente en Loir et Cher une petite communauté juive d’une centaine de personnes. Elle est constituée pour l’essentiel de membres des administrations, de médecins, de petits industriels et de commerçants, implantés à Blois, Vendôme, Romorantin et dans quelques gros bourgs.

Des « parisiens » y possèdent des résidences secondaires particulièrement en Sologne.

Il s’agit quasi exclusivement de Juifs français de naissance ou naturalisés.

Dès la moitié des années trente, et ce mouvement s’accélère en 1938-39, des opposants aux nazis avaient quitté l’Allemagne. Certains s’étaient installés en Loir et Cher, prioritairement à Blois.

Ces réfugiés allemands, puis autrichiens, sarrois, etc. Juifs pour une large partie, constitueront les fameux « indésirables » internés dès la déclaration de guerre, dans les camps de Vichy dont plusieurs existaient en Loir et Cher.

Certains seront libérés au moment de l’offensive allemande, resteront dans le Loir et Cher et plusieurs seront déportés.

Beaucoup, transférés dans d’autres camps en zone libre, seront livrés ultérieurement aux allemands et exterminés.

Puis, des Juifs tout particulièrement de la Région Parisienne, espèreront passer inaperçus à la campagne. Ils viennent s’y réfugier.

Il s’agissait de Juifs qui avaient pour la plupart refusé de se faire inscrire sur les registres obligatoires de juifs. Ils abandonnèrent biens et situations professionnelles pour se transformer en ouvriers agricoles dans des fermes isolées qui manquaient de main d’œuvre.

D’autres Juifs, souvent l’encore de la Région Parisienne, mirent en oeuvre des procédures légales de rapprochement de la Ligne avec la perpective de la franchir une fois installés. Ces Juifs demandaient l’autorisation officielle de déménager et d’aller à la campagne pour des raisons de santé, généralement celle des enfants. Un médecin patriote se chargeait du certificat médical nécessaire.


Trois principales phases du passage

Disons-le d‘entrée de jeu : l’écrasante majorité des Juifs qui tenteront le passage de la Ligne de manière clandestine, réussiront leur entreprise.

Ce qui, hélas, ne les mettra pas à l’abri d’une arrestation et déportation ultérieures.

On peut établir trois principales phases du passage dans notre département 


Celle après les premières lois anti-juives :

Dès l’été 1940, la loi de dénaturalisation, puis le premier Statut des Juifs en octobre et ses exclusions en chaine, le début de « l’aryanisation » de l’économie à l’automne, la loi du 4 octobre qui permet d’interner des Juifs étrangers, etc. conduisent à une prise de conscience des Juifs des dangers qui les guettent.

On le sait cette prise conscience sera lente car beaucoup de juifs, surtout parmi les français de naissance, reconnus depuis 1791, ne pouvaient imaginer que le pays des droits de l’homme, les traiteraient comme les nazis allemands.

Ces mesures répressives conduiront début 1941 à un premier train de départs vers la zone libre concernant notamment des juifs français, membres de la communauté loir-et-chérienne et appartenant aux couches intellectuelles et/ou aisées.


Celle après les premières grandes rafles de l’année 41 :

La rafle dite « du billet vert » porte arrestation et internement le 14 mai 1941 de 6694 Juifs étrangers de la Région Parisienne.


Le 20 août suivant, 4000 Juifs sont internés à Drancy, déjà camp d’internement, qui deviendra un des « camps de juifs ».

Puis, le 12 décembre, ce sera la rafle des 743 « notables » Juifs de Paris.

Les Juifs vivant en situation de « clandestinité » dans nos campagnes passent alors, nombreux, la Ligne ainsi que d’autres membres de la communauté initiale du Loir et Cher qui résistaient jusqu’alors à l’idée d’un départ. Un mouvement notable de juifs de la Région parisienne vers la Ligne se confirme.


Celle de la terrible année 1942 :

L’année 1942 est l’année de l’horreur.

Sur les 76000 Juifs de France déportés dont 11000 enfants, environ la moitié sera déportée et exterminée en 1942. Le second semestre étant le plus meurtrier.

Car, le 20 janvier, s’est tenue à Berlin la Conférence de Wannsee qui a décidé la mise en oeuvre de la « solution finale » dans tous les pays occupés.

Les arrestations individuelles se multiplient.

Le 27 mars, le premier convoi de Juifs de France quitte Compiègne vers Auschwitz emportant 1112 hommes vers la mort.

L’institution du port obligatoire de l’étoile jaune début juin, les rafles du Veld’hiv en juillet, celles d’aout en zone libre par le gouvernement de Vichy en accord avec les Allemands, précipitent les départs vers la Ligne.   

Il s’agit alors de Juifs majoritairement de la Région parisienne et du nord de la France.

On relève aussi des ressortissants belges et hollandais ou apatrides de ces pays qui connaissent eux-aussi la montée en puissance de la répression anti-juive.

A partir de 1943, les arrestation de Juifs sur la Ligne deviennent rares ce qui est le signe d’une diminution vraisemblablement très importantes des tentatives de passage, suite aux répressions.

Toutefois, si la ligne n’existe plus officiellement depuis le 11 novembre 1942 qui a vu les Allemands occuper la zone « libre » qui devient zone Sud, et dans la pratique depuis mars 1943, les passages clandestins vont se poursuivre car les contrôles allemands demeurent aux anciens points de passage obligatoires et ils distribuent au compte-gouttes les autorisations de déplacements.

Résistants, prisonniers de guerre ou autres en fuite, aviateurs étrangers des avions abattus, réfractaires du STO, auront toujours recours au passage clandestin pour franchir le Cher.

Les modalités du passage

Le passage de la Ligne sur le Cher était recherché.

Proches de Paris et de Tours, les communes de Montrichard, Noyers-St. Aignan, Selles sont desservies par des gares, des lignes de tramways et de cars. Ce sont les trois points de passage officiels. Et il y a toutes les autres petites communes qui bordent le Cher.

A coté des filières organisées par les mouvements de résistance, c’est le bouche à oreille, les réseaux de sociabilité, qui permettaient aux candidats au passage de choisir le lieu et de chercher un passeur.

Les vignerons, les hôteliers, les restaurateurs furent au coeur de ces réseaux de sociabilité car bien des parisiens aisés ou ayant de la famille dans la région, venaient avant-guerre s’approvisionner en vin ou se rendaient en villégiature sur les bords de la Loire et du Cher.

Depuis, le début de la guerre, ils venaient aussi au ravitaillement dans une zone agricole aux multiples fermes.

La Plage de Montrichard et ses programmes de festivités avait une réputation quasi nationale.

Des passeurs étaient devenus de vrais professionnels et les passeurs occasionnels furent très nombreux, notamment dans le débuts de la mise en place de la Ligne.

Il n’est pas superflu de rappeler que le plus grand nombre de ces passeurs ne furent pas des profiteurs et risquèrent leur vie par altruisme et patriotisme. La gratuité était quasi la norme.

Mais on doit à la vérité de dire que quelques passeurs occasionnels s’étaient  « spécialisés » dans le passage des Juifs pour les « racketter » car pour eux et les antisémites, tous les Juifs étaient forcement riches !

J’ai recueilli des témoignages d’Anciens qui avaient assisté à ces comportements déshonorants.

Pour le passage, les moyens employés étaient diversifiés.

Chaque passeur avait les siens comme il avait ses « coins ».

On franchissait la ligne sur le Cher : en barque, à gué, à la corde, sur le tablier d’une écluse, de nuit mais aussi de jour.

Les passeurs travaillaient avec un alter ego sur l’autre rive.

On traversait le pont autorisé d’une des villes citées cachés de bien des façons dans un moyen de transport du passeur ou englobé dans un groupe.

Certains tentaient de franchir la Ligne de manière légale, généralement en car ou à pied.

Il fallait alors détenir de faux papiers ou avoir un patronyme ressemblant à un nom de famille « aryen ».

Bien des dangers guettaient les Juifs à leur arrivée en ville de passage.

On pouvait les remarquer par leurs vêtements plus élégants que ceux de nos campagnes, par leur accent pour les juifs étrangers, par leurs bagages souvent trop volumineux.

Des témoignages d’Anciens racontent que des habitants surveillaient les arrivées de cars et de trains pour repérer ces candidats au passage et notamment les Juifs, pour les aider en attendant de trouver un passeur.

Toute imprudence pouvait coûter cher !

Les documents d’Archives sont généralement muets sont les conditions des arrestations (sauf celles intervenues à Montrichard le 1er août 1942) : au moment des contrôles pour les passages légaux ? Avant le passage clandestin par dénonciation ? En ville, dans une planque, sur la ligne ?

La rafle de Montrichard est significative de ces dangers ou imprudences : dans la nuit du 31 juillet/1er aout 1942, sept personnes juives sont arrêtées dans des hôtels de la ville par « plusieurs policiers allemands accompagnés d’un inspecteur de police français ». Une descente de police avait été opérée car les autorités d’Occupation avaient « remarqué la présence de nombreuses personnes juives dans cette localité située en bordure de la Ligne de Démarcation ».

La répression sur la Ligne

La majorité des arrestations opérées par les Allemands le seront pour tentative de « franchissement de la frontière » jusqu’en 1943.

Parfois, les Juifs arrêtés vont cumuler trois motifs de répression : le précédent plus le « déplacement sans autorisation » et le « non port de l’étoile jaune ».

Puis, à partir de 1943, ce sont les arrestations pour soupçons de faits de résistance qui se multiplieront.  

Les autres motifs portaient sur des délits concernant la sécurité et les domaines directs des compétences des Allemands : vols et mauvais travail dans leurs lieux d’occupations et d’activités, non remise des armes détenues, injures et manifestations d’hostilité aux troupes d’occupation, etc.

La police française était compétente pour les délits de droit commun et contre la politique du gouvernement de Vichy, notamment la propagande gaulliste et communiste.

Les personnes arrêtées sur la Ligne étaient conduites généralement à la prison allemande de Romorantin puis à Blois pour y être jugées.

Quelques unes arrêtées sur Montrichard étaient conduites à une prison de Tours et, pour les Juifs, internés ensuite au camp de La Lande.

Quelques unes furent aussi dirigées sur les prisons de Vierzon et Bourges.

Les premières étaient traduites devant le Tribunal allemand, le FK 589, qui deviendra par la suite de réorganisations administratives allemandes, le FK 641.

Elles étaient alors incarcérées à la prison de Blois qui était une prison mixte car l’administration pénitentiaire française gérait les prisonniers au titre des allemands avec les siens. Elle était rétribuée pour ce faire.

Pour les peines très courtes, les détenus restaient parfois à Romorantin, s’il y avait des places libres dans la prison allemande, séparée de la prison française.

Dans les premiers mois, les condamnations pour passage de la Ligne sont relativement légères : de quelques jours à deux semaines. Ainsi, on relève parmi les arrestations, plusieurs personnes au patronyme juif qui, une fois leur peine purgée, seront libérées comme les autres contrevenants.

Les soldats allemands, laissés sur place, souvent âgés, et qui avaient été affectés à la surveillance de la Ligne, sont remplacés le 28 avril 1941 par des « douaniers ». 

C’est un corps de militaires spécialisés, dotés de chiens, qui va être beaucoup plus efficace dans la répression !

En mai 1941, les autorités allemandes se plaignent auprès du Délégué Général dans les Territoires Occupés de la recrudescent de tentatives de passages de la Ligne et lui font part de leur intention de punir sévèrement les coupables.

Effectivement, les peines de prison deviennent plus longues : 3 semaines, un mois, voire deux mois et sont souvent assorties d’une amende en équivalent marks d’Occupation.

Le 15 décembre 1941, le Ministre de l’Intérieur fait savoir au Préfet « qu’il a constaté une certaine recrudescence des passages clandestins de la Ligne de démarcation par des Israélites étrangers ». Il invite le Préfet à « renforcer la surveillance de la Ligne », « à appliquer des mesures très sévères comportant notamment leur internement administratif » et « à faire procéder sans délai à l’éloignement de tous les individus qui facilitent ces passages clandestins »

Le 12 août 1942, un rapport du Commandant de Gendarmerie de la Section de Blois informe le Préfet qu’après des arrestations intervenues à Montrichard, on a relevé que « de nombreuses personnes ont tenté de franchir la ligne de démarcation et ont été arrêtées par les douaniers allemands dont la surveillance avait été renforcée. Pour la première fois depuis l’occupation, les voyageurs des trains et des autocars ont été interpellés au départ et à l’arrivée ». Il rajoute qu’ensuite « seule la Ligne de Démarcation est gardée avec plus de vigilance ».

L’année 1942 va ainsi marquer un crescendo dans l’escalade de la répression.

Pour les non-juifs, les peines tournent autour des 3 mois.

Pour les Juifs français, la peine est parfois la même que pour un non Juif car les allemands maintiennent un semblant de fiction par rapport aux autorités françaises. Mais dans plusieurs cas, ces Juifs seront transférés dans un camp de détention du Loiret, puis déportés, avant l’expiration de leur peine.

Pour la majorité des Juifs arrêtés en 1942, identifiés comme tels par les Allemands, les peines seront de l’ordre de six mois. Dans la pratique, le destin de ces Juifs était, en fait, scellé d’avance.

Il était souvent indiqué sur le registre d’écrou de la prison qu’ils devaient être conservés en détention après la fin officielle de leur peine ou sur le procès verbal de leur jugement transmis aux autorités françaises, il était précisé qu’ils devaient être conduits « dans un camp de Juifs », une fois leur peine purgée.

Ce sont des gendarmes français qui étaient chargés de cette besogne et y conduisaient les victimes en voiture ou en train.

Les passeurs, particulièrement ceux ayant tenté de faire passer des juifs en 1942, seront pour plusieurs déportés.

L’examen des archives sur la répression anti-juive sur la Ligne de Démarcation apporte des exemples supplémentaires de la coopération des police et gendarmerie françaises avec les autorités d’Occupation, dans le cadre de la mise à disposition des services administratifs de Vichy.

Ainsi, le Préfet de Loir et Cher dans un courrier du 27 juin 1941, se plaint auprès du Commandant de la Feldkommandantur d’Orléans « que les brigades de gendarmerie françaises reçoivent souvent à la dernière minute les ordres concernant des endroits fixés par le plan de patrouilles de la Feldkommandantur » !

Les gendarmes avaient été chargés de remettre les étoiles jaunes aux Juifs résidant dans les bourgs qui étaient connus car inscrits sur les registres officiels.

A cette occasion, ils découvriront des juifs clandestins et les signaleront aux autorités de Vichy, ce qui facilitera les répressions à venir.

Mais il convient de souligner que quelques gendarmes (qui sont ou seront des Résistants) avertiront les juifs des dangers qui les guettaient.

Les Victimes de la répression sur la Ligne

Cette liste a été établie à partir des arrestations effectuées par les autorités allemandes et des registres d’écrou de la Prison de Blois. Les registres n’existent plus pour la prison de Romorantin pour la période concernée.

La mention « juif ou juive » se généralise en 1942.

J’ai recoupé ces données avec celles du Mémorial de la Shoah, du Mémorial de la Déportation des Juifs de France de Serge Klarsfeld, de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation.

J’ai aussi utilisé tout renseignement indiquant une tentative de passage en Loir et Cher mais je n’ai pas retenu quelques cas incertains.

La date sur les documents est soit celle de l’arrestation, soit celle du jugement de condamnation, mais peu de jours les séparaient.

Le lieu d’arrestation sur la Ligne n’est pas toujours indiqué. Il en va de même pour la durée de la peine.

Les difficultés majeures rencontrées sont les mêmes que pour mes précédentes recherches sur la Shoah : l’orthographe des noms déformée, la francisation d’usage des prénoms, le nom des femmes répertoriées sous leur nom de naissance ou de mariage, l’imprécision de dates et lieux de naissances ou de résidence, etc.

Autant d’éléments qui accroissent les risques d’erreurs et d’omissions.

Lorsque des noms avaient été inclus dans les deux listes précédentes déjà publiées, je m’en suis tenue à à un simple rappel du nom avec un éventuel complément.

Enfin, il convient de souligner que pour l’attribution de la mentions « Mort (e) en déportation » de nombreux dossiers sont toujours en attente.

La liste des victimes de la répression sur la Ligne est donc forcément incomplète et comporte des imperfections.

ADDA Fernand

Liste 1


AGMAN Marie

Née le 26 décembre 1926 à Paris.

Son père avait été naturalisé. Il était marchand forain en lingerie.

Elle demeurait à Boulogne-Billancourt (92).

Elle est arrêtée le 13 août 1942 et condamnée à 4 mois de prison.

Il est précisé dans le PV allemand : « Après exécution de la peine, la sus-nommée sera internée dans un camp de juifs ».

Elle sera déportée 13 jours plus tard par le convoi n°24 du 26 août 1942 au départ de Drancy.

Son nom est inscrit sur le Mémorial des Déportés Juifs des Hauts de Seine dans le parc de Sceaux.


AJZENBERG Arthur

Liste 1


BOURKOWITCH Georges

Liste 1

BUCHBINDER Pessa

Née FRYDMAN le 15 mai 1896 à Jezow (Pologne)

Elle demeurait à Aubervilliers (93).

Elle est arrêtée le 14 août 1942.

Elle est déportée par le convoi n° 35 du 21 septembre 1935 au départ de Pithiviers.

Mention « Morte en déportation » : Arrêté du 20 novembre 2020 (JO du 23 décembre 2020)


BUCHBINDER Rajzla

Liste 1


CASTORIANO

Esther et Suzanne

Liste 1


CERF

Angèle, Marthe et Suzanne

Liste 1


CRAIN Jean

Liste 1

Complément :

Il est arrêté le 14 août 1942.

Il est transféré à Pithiviers le 18, puis à Drancy le 25 et re-transféré à Pithiviers pour être déporté par le convoi n° 35 le 26 août 1942.


DODIUK David

Liste 1


DREYFUS Robert Salomon

Né le 13 avril 1889 à Levallois-Perret (92).

Il y demeure. Il est employé de commerce.

Il est arrêté en juillet 1942 et condamné à 3 mois de prison et 300 RM d’amende.

Il devait exécuter sa peine à la prison de Blois.

Il sera transféré à Drancy et déporté par le convoi n° 53 du 25 mars 1943 à destination de Sobibor.

Mention « Mort en déportation » : Arrêté du 29 novembre 2011 (JO du 29 février 2012).


DYSTELMANN Samuel Paul

Liste 1


FLESSEMAN Elie

Né le 16 janvier 1884 à Rotterdam (Pays-Bas)

Hollandais

Il est ingénieur conseil.

Il est arrêté à St. Aignan et transféré au camp de La Lande (Indre et Loire), le 6 octobre 1942.

Transféré à Drancy et déporté par le convoi n°47 du 11 février 1943;

Mention « Mort en déportation » : Arrêté du 12 mars 2020 (JO du 21 tard 2020).


FLESSEMAN Marius

Né le 17 février 1931 à Amsterdam (Pays-Bas).

Il est arrêté et déporté avec son père.

Le même arrêté lui attribue la mention « Mort en déportation ».


FRANTZ René

Né le 28 août 1924 à Paris.

Il demeurait à Puteaux (92)

Il est arrêté le 22 février 1943.

Il est déporté le 16 avril 1943 par le transport de Compiègne à Mauthausen.

Il portera le numéro 26432 et rentrera de déportation le 24 mai 1945.


FRYDMAN Ruchla

Née KALISZ le 22 octobre 1911 à Bedzin (Pologne).

Elle est arrêtée le 14 août 1942.

Elle demeurait à Paris.

Elle est déportée par le convoi n°24 du 26 aout 1942 au départ de Drancy.


FUTRAN Vladimir

Liste 1

Complément :

Mention « Mort en déportation » : arrêté du 21 septembre 2021 (JO du 12 octobre 2021).


GALANTER Smul

Liste 2


GOLDBERG Marie

Liste 1


GOLMAN Bernard

Liste 1


GOMPEL Alfred Claude

Liste 1


GYNEAYGER Michela

Liste 1


HAMBOURGER Isidore

Liste 1


HARTOG Heinrich

Né le 18 novembre 1915 à Nimègue (Pays-Bas)

Hollandais

Il est arrêté le 2 juin 1942.

Il est transféré à Pithiviers et déporté par le convoi n° 24 du 26 août 1942 au départ de Drancy.


HARTOG Dolf

Né en 1920 à Nimègue.

Il est arrêté avec son frère.

Il survivra à la déportation après avoir été transféré de Auschwitz dans plusieurs autres camps et participé aux marches de la mort.


HERMELIN Simon ou Siméon

Liste 2


ITELSHON

Ida , Odette et Simone.

Liste 2

Complément :

Ida aurait dû terminer sa peine à la prison de Blois le 16 avril 1943. Le 12, le chef du SD-SIPO, Bauer, demande son transfert au camp de Beaune La Rolande. Le Préfet lui répond qu’elle n’y est pas. Les Allemands avaient récupéré son dossier le 26 octobre 1942 et avait transféré Ida et ses deux filles à Drancy, le 21 novembre.

Elles seront, rappelons-le, déportées par le convoi n°55 du 23 juin 1943 au départ de Drancy.


KLAJMAN Melich

Né en 1894 à Bichava ou Biehava.

Il est belge et demeure à Bruxelles.

C’est un artisan fourreur.

Il est arrêté le 22 août 1942 et condamné à 6 mois de prison.

Il est déporté par le convoi n° 26 du 31 août 1932 au départ de Drancy.


KLAJMAN Mendel

Né le 22 juin 1922 à Lublin (Pologne).

Il est belge, demeure avec son père et exerce la même activité.

Il est arrêté et déporté avec lui.


KLEIN Marcel

Liste 1


KRASNOBRODA Guela

Née BELACH le 27 octobre 1909 à Astrakan (Russie).

Elle demeure à Clermond-Ferrand.

Elle est vendeuse.

Elle est arrêtée le 12 août 1942 et condamnée à 10 semaines de prison.

Elle est déportée par le convoi n°60 du 7 octobre 1943 au départ de Drancy.


KUNA Chaim

Liste 1


LANDAU Jacques et Paul

Liste 2

Complément :

Pour Jacques (Jacob) LANDAU : il est décédé le 15 mai 1943 au camp de travail de Kochanowice en Pologne.

Mention « Mort en déportation » : arrêté du 20 avril 1993 (JO du 3 juillet 1993).


LANG Alexandre

Né le 13 janvier 1900 à Marseille

Directeur commercial.

Il demeure à Paris.

Arrêté le 14 juin 1941, incarcéré et relâché quelques jours après et arrêté à nouveau à son

arrivée à Paris.

Il est déporté par le convoi n°3 du 22 juin 1942 au départ de Drancy.


LEHMANN Myriam

Liste 1


LEVY Joseph

Liste 1

Complément :

Arrêté le 29 décembre 1942 et non le 10 octobre.

Condamné à 2 mois de prison.


LEVY Violette et Jean

Liste 1

( voir sur ce site, l’article « La rafle de Bourré le 10 septembre 1942 » ).


MARCOU Jean

Il demeure à Paris;

Arrêté le 9 mars 1942.

Condamné à 6 mois de prison.


MEYER-SIESBYE

Arrêté le 1er août 1942 à Montrichard.

Condamné à 2 mois de prison.

En fait, il s’agit de Claude MEYER dit SIESBYE, né en 1920 et décédé en 1969. C’était un cousin de la famille CERF. Il les avait accompagnés pour les aider. Il sera rapidement libéré aprè avoir fait la preuve de sa non appartenance à la « race juive » suivant la définition de la législation de Vichy ( renseignements fournis par des parents que je remercie ).


MOOCK Lucie

Liste 1

NEUMANN Marie

Née FEUER, le 8 novembre 1909 à Horodenka (Ukraine).

Dans les années 1931-32, elle vient en France avec ses trois soeurs : Rifka qui a épousé Max GITTMAN, couvreur ; Sarah qui a épousé Jacob NEUMANN, ébéniste menuisier et décède à Tours en janvier 1941; et Debora brodeuse qui n’est pas mariée.

Marie a épousé, elle, Wolf NEUMANN, couvreur, qui décède d’un cancer en mai 1941.

Ils ont deux enfants Francis né en 1936 et Jacqueline en 1937.

Ces quatre familles s’étaient installées à Tours. Elles vont être broyées par la Shoah.

En mars 1942, son beau-frère Max GITTMAN s’enfuit en zone libre à St. AIgnan car il est désigné comme otage après un attentat anti-allemand à Tours.

Sa soeur Rifka GITTMAN est déportée par le convoi n°8, ses deux enfants emprisonnés au camp de La Lande puis confiés à Marie.

Son autre soeur Debora est arrêtée en octobre 1942 et déportée.

Jacob NEUMANN puis les deux enfants de Max le rejoignent en réussissant à passer la Ligne à Noyers qu’un pont sépare de St. Aignan en zone libre.

A son tour, Marie, ses deux enfants (6 et 5 ans) et sa nièce Fanny NEUMANN (11 ans) partent. Fanny, handicapée, est en fauteuil roulant.

La famille a logé dans un café proche du pont. Un adolescent est chargé de faire d’abord passer avec lui les deux plus jeunes enfants « pour aller à la messe ». Sur le pont, il criera : « Ce sont des Juifs ».Le douanier allemand s’apprête à laisser passer les enfants car il s’intéresse à l’adolescent, connu pour s’adonner au marché noir.

Mais Marie, affolée, sort en criant du café et court vers eux.

Marie et les trois enfants sont arrêtés.

Nous sommes effectivement le samedi 21 novembre 1942, fête religieuse, avec messes et autres cérémonies, de la Présentation de la Vierge Marie au Temple.

Marie et les enfants sont détenus à la prison de Romorantin puis libérés.

Ils semblent avoir passé la Ligne à Vierzon-Bourgneuf et rejoindront les leurs à Seigy, commune proche de St. Aignan. Les enfants iront à l’école à St. Aignan, Marie travaillera dans une ferme et fera des travaux de couture. Les oncles Jacob et Max demeureront « clandestins ». Les enfants GITTMAN avaient été cachés dans des familles d’accueil dans l’Indre et le Cher.

(témoignage recueilli par Marie-Paule FRESNEAU-PETITGIRARD auprès de Jacqueline NEUMANN).

OUDKERK Gérard

Né le 25 septembre 1918 à Amsterdam (Pays-Bas)

Il demeure à Amsterdam où il est gérant.

il est arrêté St. Aignan.

Il est déporté par le convoi n°47 du 11 février 1943 au départ de Drancy.


OUDKERK Louise

Née le 27 octobre 1914 à Amsterdam (Pays-Bas).

Elle y demeure ; sans profession.

Arrêtée et déportée dans les mêmes conditions que Gérard.


PERELSTEIN Raymond

Liste 2


PICK Jenta et Solange 4 ans.

Liste 1


PODGOSER Chana

Liste 2


PORTHAULT Louis

Il demeure à Paris.

Il est cimentier.

Il est arrêté le 28 décembre 1942 et condamné à 6 mois de prison.

Sa femme, condamnée à 3 mois, est hospitalisée à l’hôpital de Romorantin.


RAJZ Mordka

Né le 21 février 1895 à Chmielnik (Pologne)

Il est arrêté à St.Loup sur la Ligne.

Il est déporté par le convoi n° 51 du 6 mars 1943 au départ de Drancy.

Mention « Mort en déportation » : Arrêté du 28 mars 2013 (JO du 18 mai 2013).


REISS Lucienne

Liste 1


ROSEN-JACOBSON Edouard Jacob

Né le 15 septembre 1916 à Rotterdam.

Hollandais.

Il demeure à Wassenaar

il est arrêté le 5 aout 1942 et condamné à 6 mois de prison.


ROSEN-JACOBSON Raphael Joseph

Hollandais.

Il demeure à Nijmegen.

Il est arrêté et condamné dans les mêmes conditions que Edouard Jacob.


SALMAN Schoulem

Né le 3 avril 1894 à Batoum (Géorgie)

Médecin à Paris.

Ouvrier agricole à Boulogne près de Tour en Sologne

Arrêté le 4 décembre 1942.

Condamné à deux mois de prison.

Transféré et déporté le 12 août 1943 à l’ile d’Aurigny par le convoi n° 641.

Libéré à Drancy le jour de la libération du camp le 18 août 1944


SELIGMAN Julius et Berthold

Liste 2


SCHECHTER-KOCH Simcha

Né le 30 avril 1889 à Zablotowo (Pologne)

Il demeure à Paris ; marchand de cuirs.

Il est arrêté à Noyers le 27 octobre 1942.

Il est déporté par le convoi n° 47 du 11 février 1943 au départ de Drancy pour Sobibor.


SCHECHTER-KOCH Rebecca

Née le 31 mars 1892 à Jaquelnico (Autriche)

Elle demeure à Paris ; sans profession.

Elle est déportée par le même convoi que son frère.


SILBERSTEIN Radona

Né en 1906 à Suwalki (Pologne).

il demeure à Paris.

Il est arrêté en août 1942 et condamné à 6 mois de prison.

Il est déporté par le convoi n°24 du 26 août 1942.


SKOPICKI Chil, Sarah et Arno ou Armand.

Liste 1


SPINSKLEE Roger

Liste 1


STEIN Chaja (Hélène)

Née le 16 novembre 1886.

Nationalité polonaise et demeure en Belgique.

Elle est arrêtée le 19 août 1942 et condamnée à 6 mois de prison.

Elle est internée au camp de La Lande (Indre et Loire.)

Elle est déportée par le convoi n°31 du 11 septembre 1942 au départ de Drancy.

Elle a été rajouté en dernière minute pour compléter un convoi, comme cela se pratiquait car la fiche de déportation indique : « Partants non encore inscrits, Liste 2 »


STEIN Elli

Née le 8 Juillet 1921 à Leipzig (Allemagne)

Nationalité polonaise et demeure en Belgique.

Arrêtée, internée et déportée dans les mêmes conditions que Chaja.


STERN Jean

Né le 1er décembre 1927 à Oeynhausen (Allemagne).

Il demeurait à Paris et il était étudiant.

Réfugié à Chambord dans l’hôtel de LE MEUR (du Réseau Adolphe/SOE).

Il est arrêté le 2 juillet 1943.

Il est déporté par le convoi n°58 du 31 juillet 1943. au départ de Drancy.

Mention « Mort en déportation » : arrêté du 26 juin 2003 (JO du 10 août 2003).


TROTTELEAU Fanny

Née ORBACH le 5 janvier 1902 à paris.

Elle est arrêtée et condamnée à 6 semaines de prison.

Il est décidé son « transfert dans un camp de juifs à l’expiration de sa peine ».

Elle décède le 20 octobre 1981 à Levallois-Perret (92).


VISOCEKAS Léonas

Liste 1


WAINBAUM Lucie

Née BRAUMAN à Paris le 30 octobre1900

Elle demeure à Levallois-Perret.

Elle est pharmacienne.

Elle est arrêtée le 1er août 1942, à Selles.

De Pithiviers, elle sera transférée à Drancy le 15 août 1942 où elle s’occupera d’une des infirmeries des enfants.

Plaidant, grâce à des faux documents, son rôle majeur dans les recherches sur la maladie de Raynaud, des amies obtiennent sa libération en juin1943, avec l’appui d’un responsable nazi du camp atteint de cette maladie.

Elle deviendra engagée volontaire, envoyée en Allemagne en août 1944 et participera à la libération du camp de Buchenwald.

Elle est décédée le 9 septembre 1987.


WAIS Eugénie

Née NAICHOULER le 24 novembre 1911 à Voronej (Russie).

Elle demeurait à Romorantin où elle était foraine.

Elle aurait été dénoncée et tente alors le passage.

Elle est condamnée à 5 mois de prison.

Elle est déportée par le convoi n°5 du 28 juin 1942 au départ de Beaune la Rolande.

Mention « Morte en déportation » : arrêté du 20 novembre 2001 qui précise « décédée en 1944 (mois inconnu) à Auschwitz » (JO du 24 janvier 2002).


YAHIEL Lucie

14 ans

Elle est arrêtée le 1er août 1942 à Montrichard.

( Elle devait vraisemblablement accompagner les CASTORIANO car les deux familles étaient originaires de Constantinople (Turquie).

Je n’ai pas trouvé d’autres renseignements )


ZAJBERT Izchok

Liste 1


Thérèse Gallo-Villa

Monthou-sur-Cher le, 24 Mai 2022.

Sources et Bibliographie :

ADLC 1375 W 62, 63, 64, 65, 66. Arrestations par les Allemands.

ADLC 1585 W 28, 29, 30. Ecrous de la Maison d’Arrêt de Blois

Les précédents articles de l’auteure sur la Shoah dans le Loir et Cher, notamment les deux listes de victimes.

ALARY Eric, Les Juifs et la Ligne de Démarcation, 1940-1943, Les Cahiers de la Shoah, 2001-N°5.

OSTERMANN Simon, Les Juifs en Loir et Cher pendant l’Occupation, Mémoire de Maîtrise sous la direction de Michèle COINTAT, Université François Rabelais, Tours, 2002.

Les travaux de l’Association de Recherches et Etudes Historiques sur la Shoah en Val de Loire

(AREHSVAL).


Je remercie Marie-Paule FRESNEAU-PETITGIRARD de l’AREHSVAL pour les renseignement fournis sur la famille NEUMANN et Mr. Yves MOREAU, spécialiste de la déportation dans le département de la Sarthe, qui m’a communiqué les noms des FLESSEMAN et OUDKERK.